L’infestation des forêts du Grand Est par les insectes gagne du terrain, passant de la plaine à la moyenne montagne et des Vosges au Jura. Forestiers et scieurs appellent à l’aide pour évacuer les surplus de bois dans l’attente d’une sortie de crise.
Les forestiers privés ont fait leurs comptes : en neuf mois, ils ont utilisé l’intégralité des 6 millions d’euros alloués par l’Etat en début d’année pour les aider à évacuer leur bois scolyté du Grand Est vers l’Aquitaine.
Or, le fléau s’aggrave : à la faveur de saisons sèches et chaudes, les coléoptères ont grignoté cette année autant de résineux que l’an dernier, soit trois millions de tonnes de bois supplémentaire. L’Union des coopératives forestières de France demande aujourd’hui une rallonge d’au moins vingt millions d’euros sous forme d’avance de trésorerie pour trouver d’autres issues.
Sans ce soutien, les forestiers privés, qui ont vu le rendement de leurs parcelles d’épicéas chuter drastiquement depuis deux ans, ne pourront pas réinvestir dans le reboisement.
Nicolas Jobin, responsable de la communication de l'UCFF
L’ouest sature
Jusqu’à l’automne, les forestiers de l’est de la France ont pu compter sur une demande soutenue d’ industriels aquitains pour exporter leurs troncs scolytés de faible diamètre, le bois d’oeuvre peu abîmé restant autant que possible valorisé localement. Depuis juillet 2019, les coopératives lorraines Bois & Forêts de l’Est et alsacienne Cosylval ont ainsi expédié par train pas moins de 140.000 mètres cubes de bois des Vosges jusqu’aux Landes pour approvisionner le papetier Smurfit Kappa et le fabricant de panneaux Egger. D’autres clients de l’ouest de la France ont été approvisionnés par camions.
Mais le débouché aquitain s’engorge. L’UCFF, qui s’apprêtait à demander à l’Etat de soutenir des transferts est-ouest plus massifs, s’est ravisée, car une crise sanitaire, celle du Covid, a fait chuter la demande industrielle landaise alors même que la production de bois du sud-ouest repart à la hausse.
Brûler ou arroser
Les forestiers de l’est cherchent donc de nouvelles solutions pour évacuer le surplus de bois. Le grand export constitue l’une des pistes, les marchés américains et asiatiques étant demandeurs de bois, scolytés ou non. Les industries de première transformation, qui représentent 300 entreprises dans le Grand Est, militent quant à eux pour un réexamen des projets biomasse écartés par la Commission de régulation de l’énergie.
Une relance du bois-énergie leur permettrait d’évacuer les « connexes », ces sous-produits qui engorgent dangereusement leurs ateliers. Forestiers et scieurs partagent, par ailleurs, une même crainte pour la ressource future. L’UCFF sollicite les régions Grand Est et Bourgogne-Franche pour cofinancer des aires de stockage des troncs sains qui ont été coupés pour retarder l’avancée des scolytes. Leur conservation grâce à un nouveau système d’arrosage par eau de pluie constituerait une réserve de matière première aux scieurs au sortir de la crise.
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