Délégué général du Pôle métropolitain européen du Sillon lorrain, Vincent Gross a conduit à bon port la labellisation French Tech du réseau numérique lorrain Lor’N’Tech. L’ingénieur en chef de classe exceptionnelle jongle avec les concepts de temps, d’espace et de territoire pour réinventer la pertinence de l’action publique.
En accordant le label French Tech au réseau Lor’N-Tech en juin 2015, le secrétariat d’Etat à l’économie numérique a validé non seulement l’unique candidature transfrontalière de France, mais aussi l’approche singulière prônée par le Pôle métropolitain européen du Sillon lorrain pour maximiser les richesses d’un bassin de vie incluant Metz, Nancy, Thionville et Epinal ainsi que Sarrebruck et Luxembourg. Son délégué général Vincent Gross a théorisé un triptyque du lien collectif s’appuyant sur un socle de compétences, une ambition de recherche-développement et une inscription dans le développement durable pour dessiner les contours d’un écosystème numérique fluide et réactif.
J’ai toujours aimé jouer aux légos, faire des dessins, étudier les rapports de cause à effet. J’aurais voulu être architecte.
Vincent Gross
A l’issue de ses études à Centrale – où il a choisi l’option Informatique temps réel -, le jeune messin s’est frotté à la complexité du monde, de ses premiers stages dans une sidérurgie déjà déclinante à place financière de Bahreïn, où la banque Indosuez l’avait envoyé vérifier la validité des systèmes de simulation boursière. Il en est revenu impressionné par l’énormité des sommes mises en jeu et conscient, avant bien d’autres, de la volatilité de l’argent fictif.
Pionnier
Le conseil régional de Lorraine a permis à Vincent Gross de se lancer en pionnier dans les NTIC. Alors présidée par Jean-Marie Rausch, maire de Metz et ministre du Commerce extérieur, la collectivité ne comptait que 70 agents, mais s’essayait avec succès à la création d’un cluster avant la lettre – le technopole de Metz-, bâtissait Lothaire et Renather, deux réseaux universitaires précurseurs et toujours en activité, et posait les jalons de l’e-commerce. En 17 ans, l’ingénieur a successivement dirigé des technologies de l’information et des méthodes, l’ingénierie et les reconversions industrielles, puis la formation continue, l’apprentissage, l’enseignement supérieur et la recherche au titre de directeur général adjoint. Il a tiré de cette longue expérience la conviction que la réactivité et le développement de réseaux valent mieux que la puissance illusoire des gros appareils.
Au début du millénaire, un mal-être physique est venu plomber une brillante trajectoire intellectuelle. A quarante ans à peine, Vincent Gross a dû poser un nom sur le mal sournois qui l’empêchait de boutonner ses chemises. Après une phase de déni, puis une période révolte, il affronte avec courage et dignité les affres de Parkinson.
Vincent est un fataliste qui se bat. Il ne veut pas se plaindre, il dépasse les frontières par son calme et sa sérénité.
Bernard Dreyfus, délégué général à la médiation avec les services publics pour le Défenseur des droits
L’ex-directeur de la Datar a croisé Vincent Gross au conseil de professionnalisation de l’Institut national des études territorial (Inet) où il a été séduit par ses théories complexes et visionnaires de l’enseignant messin.
Relation quasi filiale
En 2004, André Rossinot, alors maire de Nancy et vice-président de la Communauté urbaine, a recruté le DGA du conseil régional de Lorraine que le nouvel exécutif s’apprêtait à remercier. L’ancien ministre de la Fonction publique territoriale n’ignorait pas la maladie de Vincent Gross, mais ne doutait pas de sa capacité à porter les grands projets de l’agglomération.
Directeur général adjoint durant deux ans, puis directeur général, ce dernier s’est appuyé sur une réflexion complexe pour fédérer et motiver le territoire.
Je suis arrivé à un moment intéressant où l’ancien district basculait vers une assemblée territoriale plus politique. Les élus communaux avaient la légitimité, les élus intercommunaux, la compétence. Le lien collectif est d’autant plus difficile à construire que le temps est devenu de plus en plus court et la notion de territoire, de plus en plus floue. Le moteur, c’est une envie collective d’avancer.
Vincent Gross
L’enseignant, professeur d’algorithmique à l’Ecole supérieure d’ingénieurs en technique de la construction et intervenant « Réseaux et territoires » à Sciences Po Paris, fait du Grand Nancy un laboratoire de travaux pratiques. André Rossinot apprécie l’engagement, le pragmatisme et la hauteur de vue de son directeur. Entre les deux hommes s’est nouée une relation quasi-filiale empreinte de tendresse et de respect.
Lorsqu’en 2011, la fonction de directeur général du Grand Nancy s’est avérée trop lourde à concilier avec la maladie, Vincent Gross a pris la tête d’une structure plus légère, mais néanmoins porteuse. Premier pôle métropolitain créé en France, le Sillon lorrain présente un potentiel de métropolisation transfrontalier de 1,2 million d’habitants.
Photographe de nuit
Sillonnant sans relâche les quatre agglomérations lorraines, Vincent Gross consacre des nuits à arpenter sa ville natale, équipé d’un appareil photo et d’un trépied. Les longs temps de pose, les focales courtes et les cadrages talentueux confèrent à Metz une beauté inédite. Entrecoupées de poignantes citations de Dante, les photos de « Metz Couleurs Nuits » ont obtenu près de 110 000 vues sur Google + et donné lieu, en avril 2015, à une exposition au profit de France Parkinson.
C.V
24 décembre 1961 : Naissance à Metz
1985 : Ingénieur à l’Ecole centrale de Paris
1987 : Chargé de mission, chef de mission puis directeur général adjoint au conseil régional de Lorraine.
2000 : Diagnostic de la maladie de Parkinson
2004 : Directeur général adjoint, puis directeur général de la communauté urbaine du Grand Nancy
2011 : Directeur général, puis délégué général pôle métropolitain européen du Sillon lorrain.
2015 : – exposition Metz couleur nuit – – labellisation de Lor’N’Tech au label French Tech.
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