La Commission européenne a proposé mi-avril un texte permettant de protéger des centaines de produits manufacturés liés aux terroirs des pays membres. Les 13 filières françaises détentrices d’une indication
La Commission européenne veut protéger la propriété intellectuelle des produits artisanaux et industriels traditionnels. Elle a officialisé ce mercredi 13 avril le projet d’une extension dans toute l’Union des indications géographiques (IG).
Les fabricants de sièges de Liffol-le-Grand, dans les Vosges, se rapprochent donc de leur pari. Première filière française à avoir décroché le label pour un produit manufacturé en 2016 , ils avaient fortement poussé l’extension de cette protection dans tous les pays de l’Union, auprès de la présidence française.
Lors du lancement de la Présidence française, Emmanuel Macron a promis de favoriser le développement endogène des marchés européens. Nos produits répondent à cette disposition.
Rémi Dauphin, directeur de l'association MadIn Grand Est, qui regroupe 140 professionnels de l'ameublement, de l'agencement et de la décoration
Nous travaillons actuellement sur la proposition juridique de règlement créant un système à l’échelle de l’UE.
Un fonctionnaire de l'Union européenne, qui précise que l'adoption de la proposition législative est prévue pour le deuxième trimestre 2022
Ménage
En cinq ans, l’IG a renforcé la notoriété des sept entreprises estampillées Siège de Liffol. Elle a contribué à pérenniser 150 emplois en zone rurale et 13 métiers enseignés dans un centre de formation commun. De la porcelaine de Limoges aux tapisseries d’Aubusson, douze autres filières ont obtenu une IG et une trentaine d’autres dossiers sont à l’étude.
Cette protection constitue à la fois un gage de reconnaissance et l’assurance d’une protection contre les usurpations ou les contrefaçons. Sitôt son IG obtenue, la filière Pierre de Bourgogne a ainsi pu mettre en demeure les revendeurs de « faire le ménage » dans les appellations abusives.
Cette protection des produits manufacturés est positive, mais pas suffisante. Il existe aujourd’hui une forte demande pour l’étendre à l’ensemble des pays membres à l’instar des vins, des spiritueux et des produits agricoles. Nous percevons des signaux positifs de la part de la Commission européenne, qui prépare une proposition de règlement sur la question.
Audrey Aubard, secrétaire générale de l'Association française des indications géographiques industrielles et artisanales (Afigia)
Certifications hétérogènes
Un enregistrement des produits artisanaux et industriels au Système international de protection des appellations d’origine et des indications géographiques, dit Système de Lisbonne, permettrait aux produits artisanaux de défendre leurs droits à l’échelle communautaire sans devoir agir séparément dans chacun des pays de l’Union en cas d’infraction.
Soutenue par de prestigieuses appellations telles le marbre de Carrare, le verre de Murano ou le tweed irlandais de Donegal, la proposition de règlement devra tenir compte de la pléthorique créativité artisanale européenne, tout en composant avec des habitudes de certification et de contrôle hétérogènes. En 2013, une étude européenne dénombrait pas moins de 834 produits artisanaux potentiellement éligibles à une IG.
Particularismes locaux
Une deuxième étude menée en 2020 sur 30 produits dans 17 pays a mis en exergue l’existence de six systèmes de protection répartis en trois catégories. Privilégiée par les pays anglo-saxons, la marque collective repose sur l’autocontrôle de ses membres. Plus proche des traditions françaises, le modèle mixte confie la gestion de l’IG à ses adhérents, les contrôles étant effectués soit par les services de l’Etat, soit par des organismes agréés. Dans le troisième cas, l’autorité publique exerce des contrôles permanents.
Plutôt que de trancher entre ces trois options, la Commission choisira probablement… d’en créer une quatrième, susceptible d’épouser au mieux les particularismes locaux. Les IG seront enregistrées soit par les services de l’Union, à l’instar des indications géographiques agricoles, soit par une agence de l’Union.
L’enregistrement s’effectuera soit en deux phases, les filières devant décrocher une IG nationale avant de se soumettre au cahier des charges communautaires, soit directement auprès de la Commission ou de son agence. Les filières se tiennent prêtes à débattre de ces options.
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