Le groupe alsacien entend reconquérir la transformation de ce matériau noble dont le traitement est depuis deux décennies réalisé en Chine. Une première ligne de vêtements est exposée au Salon des professionnels de la mode Première Vision, qui se tient jusqu’au 13 février à Paris.
Depuis janvier dernier, elles tournent comme des horloges ! Mises en service en Irlande voilà un quart de siècle, déplacées en Grande-Bretagne, revendues en Hongrie, démontées, puis remontées fin 2019, sept machines à filer le lin fonctionnent à plein régime dans les ateliers de l’entreprise Emanuel Lang, à Hirsingue (Haut-Rhin). Capables de produire chaque année 150 tonnes de fibres, elles symbolisent l’espoir d’une reprise de la transformation du lin en France. La production hexagonale, qui s’élève à 110.000 tonnes par an, est pour l’heure exportée à 80 % en Chine, le solde partant dans les pays de l’Est. Ce matériau noble est réimporté une fois filé.
Une floraison d’idées
Président du groupe Velcorex , qui compte quatre sociétés textiles alsaciennes totalisant 150 salariés pour 32 millions d’euros de chiffre d’affaires, Pierre Schmitt voit dans ses nouvelles installations un énorme potentiel.
En un mois, nous avions assisté à une floraison d’idées. Alors même que le fil de lin n’avait connu aucune amélioration depuis vingt-cinq ans, nous avons accueilli des chercheurs et des experts emballés par cette nouvelle matière, preuve que l’innovation a besoin des usines.
Pierre Schmitt, président de Velcorex
Pierre Schmitt expose au Salon des professionnels de la mode Première Vision, qui se tient jusqu’au 13 février à Paris, une première ligne de jeans, vestes et chemises en lin 100 % made in France. Elle sera vendue au printemps dans sa boutique Matières de France, ouverte l’an dernier à Colmar. Velcorex présentera également une gamme complète de tissus homme et femme. Des jeunes créateurs français envisagent d’ores et déjà des mariages audacieux entre le lin et la laine, le Kevlar ou la soie.
Nouveau business model
A une cinquantaine de kilomètres d’Hirsingue, la société NSC Schlumberger, basée à Guebwiller, suit avec un grand intérêt les projets de Velcorex. Leader mondial des machines textiles longues, le groupe alsacien, qui emploie 230 salariés pour 40 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2019, a fabriqué voilà un quart de siècle les machines d’Emanuel Lang. Il ne compte pas relancer dans l’immédiat les machines à filer le lin, mais développe déjà, sur la plateforme d’Hirsingue, des procédés de préparation de la matière qui rendent le lin plus respirant et moins froissable.
Le projet de Velcorex induit un changement de business model qui consiste à engranger de la valeur ajoutée à toutes les étapes de la production, plutôt que de faire jouer la concurrence au sein d’une filière morcelée. De fait, les pays très développés ont intérêt à réintégrer leur savoir-faire.
Olivier Demangeat, chef du service propriété industrielle et innovation chez NSC Schlumberger
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