Il dirige l’Institut Jean Lamour inauguré ce vendredi, et dont le « tube », un tunnel sous ultravide, rendra possibles des expériences inédites dans les nanomatériaux pour faire progresser des domaines allant de la production d’hydrogène au traitement des cancers. L’outil est unique au monde.
Ce vendredi matin, Thierry Belmonte doit inaugurer l’Institut Jean Lamour sur le campus nancéien d’Artem, aux côtés de la ministre de la Recherche, Frédérique Vidal, ou encore du PDG du CNRS, Antoine Petit, qui visiteront le « tube ».
Ce tunnel sous ultravide de 40 mètres de long rendra possibles des expériences inédites dans le domaine des nanomatériaux. Et pour le directeur de cet institut, qui compte 500 personnes, ce lancement est à la fois un aboutissement et un point de départ. Car l’outil, unique au monde, relève déjà d’une longue histoire.
Traitement du cancer et ordinateurs quantiques>
Voici plus de dix ans que les chercheurs de l’université de Lorraine et du CNRS coopèrent pour élaborer cette architecture complexe, qui leur permet de triturer des molécules dans un vide spatial. Ces expérimentations devraient, à terme, permettre des progrès décisifs dans la production d’hydrogène, le traitement du cancer ou la mise au point d’ordinateurs quantiques.
Pour l’heure, c’est l’euphorie de la recherche elle-même qui motive le directeur de l’institut.
Je trouve extraordinaire de voir quarante chercheurs agréger leurs compétences pour créer et se partager un même outil. Des membres du laboratoire chinois Sinano se sont inspirés de notre conception pour mettre en place leur propre tube.
Thierry Belmonte
Recruté par le CNRS à 23 ans
Mâconnais d’origine, ce spécialiste des plasmas pour les nanosciences, expert dans l’étude des interactions plasma-surface, s’est installé en Lorraine juste après un doctorat décroché à l’Institut polytechnique de Grenoble. La région du Grand Est, héritière d’une longue tradition universitaire et métallurgique, est l’un des fiefs de la recherche sur les matériaux. C’est donc à Nancy qu’il a été recruté par le CNRS dès l’âge de 23 ans.
Thierry Belmonte a alors débuté au Laboratoire de sciences et génie des surfaces de la ville une carrière brillante et linéaire qui l’a conduit au poste de directeur adjoint de l’institut Jean Lamour dès sa constitution en 2009. S’il est également codirecteur du Laboratoire d’interaction plasma extrême surface du CNRS, l’homme a longtemps préféré la recherche fondamentale aux hautes fonctions.
Comprendre
Aujourd’hui encore, lorsqu’il offre un café à son interlocuteur, ce scientifique voit dans la tasse tendue un assemblage d’alliages que l’invité ne soupçonne même pas. Le quinquagénaire, mince et courtois, se fait donc pédagogue pour évoquer les perspectives qu’ouvrent la synthèse du graphème dans le stockage de l’énergie, les promesses des quasi-cristaux dans le domaine de la phonie et de l’isolation ou encore le formidable potentiel des cadres métalliques-organiques dans le stockage de gaz.
Ce que j’aime, c’est comprendre. Se figurer la matière sous un angle différent, obtenir un début d’explication, puis imaginer le coup d’après, procure un sentiment extraordinaire.
Thierry Belmonte
Dans l’univers de l’Institut Jean Lamour, les prix Nobel font partie du décor. Un livre sur Henri Poincaré, grand nom lorrain des mathématiques, trône en bonne place sur une étagère du bureau impeccablement rangé de Thierry Belmonte.
Fasciné par les fulgurances des Fermat, Majorana et autres génies de la physique et des maths, il trouve encore parfois le temps de lire et même d’écrire – mais pour lui seul. L’homme veille également à son rôle de père auprès d’une étudiante en école d’ingénieurs et d’un lycéen préparant un bac S, et voit dans la vie de famille le plus précieux des alliages.
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