Grand axe de franchissement de la Moselle, l’ancien pont de Rapilly multipliait les signes de faiblesse. Pour le remplacer dans les meilleurs délais, la direction des routes, des transports et des constructions du conseil général a assuré la maîtrise d’oeuvre de sa déconstruction et de sa reconstruction. Réalisé sans accroc, ce projet d’un montant de 13,5 millions d’euros confirme les compétences techniques de la collectivité.
Sous surveillance étroite depuis un quart de siècle, le pont de Rapilly, délimitant les communes d’Hauconcourt et d’Ennery, a vu son sort scellé en 2011 à l’issue d’une inspection des services techniques du conseil général de la Moselle. Construit à la fin des années 40, l’ouvrage souffrait d’une malfaçon identique au pont de Sully-sur-Loire, qui s’est écroulé dans le fleuve en 1985.
Pour protéger l’acier des sustentes, qui ne résistait pas aux grands froids, les agents ont installé un chauffage dans les chambres d’ancrage du pont mosellan et protégé les barres d’ancrage par du polystyrène. Mais l’inspection de 2011 a révélé que leur section avait diminué de 40 %. Leur réparation aurait coûté au moins 4 millions d’euros pour conserver un pont fragile et mal adapté au passage quotidien de 13 500 véhicules. L’assemblée départementale a donc voté en mars 2012 un ambitieux projet de déconstruction-reconstruction de l’ouvrage d’un montant de 13,5 millions d’euros, dont elle a confié la maîtrise d’œuvre à la direction des routes, des transports et des construction du conseil général.
Compétences en interne
Les services techniques départementaux, qui étaient déjà intervenus dans des constructions et des réparations complexes, possédaient le savoir-faire requis pour assurer la maîtrise d’œuvre des travaux : ils ont réalisé une véritable prouesse en livrant le nouvel ouvrage 15 mois après le lancement officiel du chantier.
Patrick Weiten, président du conseil général de la Moselle
Constituée de sept personnes, l’équipe projet de la direction des routes planchait depuis janvier 2012 sur la réalisation d’un bow-string de 180 m de longueur pour 16 m de hauteur doté de 108 m de travée centrale. Ouvert à tous les gabarits, le pont comporte également un cheminement piéton de 1,50 m et une voie verte de 2,50 m de largeur.
Compte tenu des délais très contraints, les procédures de PPP, de conception-réalisation ou de maitrise d’œuvre déléguées auraient requis des temps trop longs. Nous nous sommes appuyés sur des partenaires avec lesquels nous travaillions depuis plus de quinze ans pour mettre immédiatement le projet sur les rails.
Gérard Bruder, chef de la division des investissements routiers du conseil général
La collectivité a retenu le bureau d’études parisien Coredia associé à l’architecte Laurent Barbier, la société Hydrogéotechnique et le Cerema (ex-Cete) pour lancer dès le mois de mai consultation des entreprises. L’appel d’offres a retenu le groupement Demathieu et Bard – Victor Buyck Steel Construction et une dizaine d’entreprises essentiellement régionales (voir fiche technique). En janvier 2013, les élus ont été conviés à une réunion publique présentant une maquette et une vidéo présentant les différentes phases du chantier en simulation 3D. Hormis trois mois de contretemps liés aux intempéries et aux fortes crues de la Moselle, le chantier s’est parfaitement conformé aux projections virtuelles.
Plusieurs contraintes
Nous travaillons alternativement sous maîtrise d’ouvrage publique et privée, la loi MOP instaurant les mêmes règles connues de tous. Dans le cas du pont Laurent Barbier, la maîtrise d’ouvrage et la maîtrise d’œuvre étaient soumis à la même pression concernant les délais et ont fait le nécessaire pour anticiper les autorisations dès la période d’études et diminuer les délais de visas de document nécessaire à ce type d’ouvrages.
Jean-François Seguin, directeur de l’agence TP Est de Demathieu et Bard
Le chantier ne manquait pas de contraintes : outre l’obligation de préserver un tirant d’eau de 70 m sur la Moselle, les entreprises ont dû composer avec la présence de deux oxyducs d’Air liquide. Le groupement a créé cinq appuis provisoires dans la rivière pour porter le tablier, puis servir au lançage de la nouvelle structure. Déplacées d’est en ouest, les estacades ont permis de phaser le chantier. Les entreprises ont coupé les suspentes, décroché le câble et grignoté le tablier par petites portions. Conservés, les appuis ont été confortés par injection de coulées de ciment. Des excroissances reposant sur des micropieux ont porté la largeur de l’ouvrage de 8 à 20 m de large.
Un chantier rondement mené
Le chantier s’est effectué sans temps mort : nous avons préparé le génie civil en parallèle de la déconstruction. Les 60 dalles en béton du futur ouvrage ont été entreposées sur une plateforme de 7 000 m2 pour parfaire leur vieillissement durant 6 à 9 mois. Les premières pièces métalliques sont arrivées en juillet pour rendu des appuis courant septembre. Le bow-string a été lancé courant novembre. A ce stade, il subsistait encore des travaux de finition dont nous avons évalué l’ampleur au fur et à mesure du chantier.
Laurent Duflot, directeur du projet
Les équipes de peinture ont ainsi dû composer avec la température et l’hygrométrie pour appliquer les couches d’anticorrosion sur 8 000 m2.
Le chantier a été endeuillé en février 2014 par la disparition de Laurent Barbier à l’âge de 55 ans. Pour lui rendre hommage, le conseil général a donné le nom de l’architecte, qui l’accompagnait dans ses grands projets depuis 15 ans, à sa dernière réalisation. Dûment instrumenté et testé, l’ouvrage est entré en service en mai 2014.
Fiche technique
- Maître d’ouvrage : Conseil général de la Moselle.
- Maîtrise d’œuvre : Direction des routes, des transports et des constructions du conseil général de la Moselle.
- Bureau d’études : Coredia.
- Architecte : Laurent Barbier.
- Titulaire : groupement Demathieu et Bard – Victor Buyck Steel Construction.
- Entreprises : Durrmeyer (fondations), TPGeo (micropieux), Colas (plateformage), Molaro (glissières de sécurité), ICMI (liaisons piétonnes).
- Calendrier : Début des travaux : février 2013 ; livraison : mai 2014.
- Coût : 13,5 millions d’euros.
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