En décembre 2012, ArcelorMittal signait avec l’Etat français un accord qui actait la fermeture des hauts-fourneaux et 629 suppressions de poste à Florange, mais garantissait des reclassements sans licenciement ni mobilité forcée. Le sidérurgiste a respecté ses engagements, mais les effectifs du site mosellan continuent de baisser.
En décembre 2012, la colère et les larmes et d’Edouard Martin, alors délégué CFDT d’ArcelorMittal, à l’annonce de la fermeture des hauts-fourneaux de Florange, ont marqué les esprits. L’accord conclu entre l’Etat et Lakshmi Mittal prévoyait 629 suppressions de poste et entérinait l’arrêt de la filière liquide (fusion continue de l’acier), mais garantissait qu’il n’y aurait ni licenciement, ni mobilité forcée. Il annonçait par ailleurs un investissement de 180 millions d’euros sur cinq ans pour recentrer le site mosellan sur la production d’acier à haute valeur ajoutée pour l’automobile et l’emballage.
Dix-huit mois plus tard, le climat social de Florange s’est indéniablement amélioré. Le volet social de l’accord a été respecté et les investissements promis se concrétisent. La réorganisation opérée à la direction du site, intégré en octobre 2012 au sein de la nouvelle division ArcelorMittal Atlantique et Lorraine, a également contribué à apaiser les tensions.
Florange est redevenu un site normal, qui a tourné la page de 18 mois de conflit et se projette dans l’avenir. Les instances se tiennent normalement, les partenaires peuvent à nouveau s’expliquer, échanger et se comprendre.
Anita Lombard, chef d’établissement de Florange depuis fin 2012
Ce retour à la normalité n’est pourtant pas exempt de tensions, de souffrance et doutes. Ponctué par trois grandes étapes – l’accord sur le volet social signé en juin 2013, la présentation de la GPEC en février 2014 et la réunion de clôture de la commission d’application et de suivi du volet social de Florange en mars dernier – le parcours reflète la volonté de tous les partenaires de sortir de l’impasse. En mai 2013, la négociation de « l’accord portant sur diverses mesures sociales en faveur des salariés d’ArcelorMittal Atlantique et Lorraine Florange en vue d’accompagner la mise sous cocon de la phase liquide de l’établissement » s’annonçait orageuse. L’intersyndicale CGT – CFDT – FO – CGC-CFE avait volé en éclat depuis belle lurette et les 126 salariés de Gepor, filiale logistique d’ArcelorMittal, redoutaient un plan social. Or, ces derniers ont été intégrés au dispositif de reclassement et les syndicats ont présenté un front uni pour négocier des mesures d’accompagnement aussi avantageuses que possible. Signé le 18 juin par la CFDT et la CFE-CGC, l’accord prévoyait, outre les départs en retraite naturels, un Accord de fin de carrière Florange (AFCF) permettant un départ anticipé ou un allègement du temps de travail pour des 271 salariés les plus âgés et détaillait les conditions du reclassement de 358 salariés en poste à la filière liquide.
Le volet concernant les séniors nous paraissait acceptable, mais nous ne pouvions pas signer un accord qui ne prévoyait aucune embauche et ne prenait pas suffisamment en compte des salariés qui avaient perdu leur outil, leur métier et parfois même de l’argent, du fait des changements de poste.
Lionel Burriello, représentant CGT d’ArcelorMittal Florange
En février 2014, la présentation de la gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences, qui prévoit 48 suppressions de poste en 2014 et 38 en 2015, a ravivé le mécontentement des syndicats, d’autant que ces suppressions ne sont compensées par aucune embauche. L’usine de de Florange accueille bien 69 apprentis des niveaux CAP à ingénieur, mais aucun d’entre eux n’a été intégré sur place et ce vivier bénéficie aux autres sites du groupe. La direction espère pouvoir recruter dès cette année 30 CDD qui ont vocation à se convertir en CDI, mais ces embauches atténueraient à peine la fonte des effectifs. Entre les départs à la retraite et les mesures AFCF, Florange perdra 550 salariés d’ici à décembre 2015. L’usine, qui emploie aujourd’hui 2 300 personnes – contre 3 000 voici cinq ans – descendra bientôt sous la barre des 2 000 salariés.
Le repositionnement des salariés passés de la filière liquide à d’autres secteurs de l’usine a mobilisé pas moins de 10 commissions de suivi. L’intégralité des 358 reclassements nécessaires a été effectuée. Chaque salarié a été reçu individuellement par la direction des ressources humaines et par le cabinet de consultants CDR pour construire son nouveau projet professionnel en fonction des postes à pourvoir, de ses compétences et de ses aspirations. 312 personnes ont été repositionnées sur de nouveaux postes et 23 d’entre elles ont été mutées en-dehors du site de Florange selon le principe double volontariat, le salarié exprimant son accord pour le détachement, puis pour l’intégration définitive au poste. Enfin, 23 autres salariés sont positionnés sur un poste, mais leur affectation définitive n’est pas encore actée.
Chaque reclassement s’est composé de deux étapes : un parcours individualisé compris entre 2 et 4 mois, assorti d’une prime de 2 600 euros, pour valider le projet de reconversion, puis un parcours de progression accompagnée d’une durée maximale de 9 mois assorti d’une prime de 1 000 euros. Les parrains, presque aussi nombreux que les salariés repositionnés, et les salariés des secteurs d’accueil, ont également bénéficié de primes et de crédits spécifiques.
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