CEO de la Rockhal d’Esch-sur-Alzette depuis son ouverture en 2005, Olivier Toth et son équipe ont érigé la salle de concerts luxembourgeoise en haut-lieu européen de la musique amplifiée. L’établissement de 34 salariés compte plus de 2.000 concerts à son actif et a accueilli 220.000 spectateurs en 2017.
Avocat, musicien auteur compositeur et producteur, Olivier Toth a inscrit la Rockhal dans plusieurs réseaux internationaux, européens et grand-régionaux.
La Rockhal a été le premier bâtiment inauguré à Belval. Faut-il y voir un symbole de la reconversion d’une friche industrielle par la culture ?
Certainement. Mais la Rockhal a d’abord été construite parce qu’il manquait au Luxembourg un lieu d’envergure pour les musiques amplifiées. La salle de concert était initialement prévue dans la halle des soufflantes, mais un bâtiment neuf s’est avéré plus fonctionnel. Nous disposons ainsi d’un espace complètement modulable d’une capacité allant jusqu’à 6.500 spectateurs.
En même temps que la salle de concerts s’est ouvert le Rocklab. Ce centre de ressources constitue un lieu d’initiation, de transmission des savoirs, de pratique instrumentale et vocale, d’expérimentation et de création. Le Rocklab comme la Rockhal sont des équipements de rayonnement à la fois locaux, régionaux et internationaux. Avant, je me déplaçais jusqu’à Bruxelles, Paris ou Frankfort pour voir certains concerts. Aujourd’hui, je vois des spectateurs de ces villes venir à la Rockhal.
Depuis juin 2017, la Rockhal est adhérente de la European Arenas Association. Qu’attendez-vous de ce réseau international ?
La European Arenas Association rassemble 31 des plus grandes et des meilleures salles d’Europe dans 20 pays. Les membres géographiquement les plus proches de la Rockhal sont l’Accord Hotels Arena de Paris-Bercy, le Forest National à Bruxelles ou Ahoy à Rotterdam. Nous développons des compétences avec les membres de l’EAA et arrêtons des positions communes par rapport à nos champs d’activités. Nous entretenons un dialogue structuré et des échanges d’expériences qui nous permettent notamment d’aller plus loin en matière de sécurité, de parvenir à une meilleure connaissance du public ou de mieux appréhender l’évolution digitale. Nous échangeons également sur nos contextes économiques respectifs, sur l’accompagnement du public ou le processus marketing.
De quels autres réseaux la Rockhal fait-elle partie ?
Nous avons cofondé en 2014 la plateforme Liveurope, qui regroupe 14 salles européennes pour contribuer à l’émergence d’artistes européens auxquels nous proposons des opportunités dans des pays membres de l’Union Européenne. Nous nous sommes associés à huit partenaires pour fonder le projet Inès (Innovation Network for European Showcases). Egalement soutenu par le programme européen Europe Créative, Ines accompagne les artistes et professionnels émergents du secteur de la musique à travers huit festivals et les met en contact avec des confrères à un niveau européen. Dans la Grande Région, nous participons au programme Multipistes, qui regroupe, outre la Rockhal, des salles situées en Lorraine, en Wallonie, en Sarre et en Rhénanie-Palatinat. Les membres accueillent des artistes en résidence, leur donnent accès à du matériel de scène et de studio et les accompagnent dans le réseau professionnel de la Grande Région.
Comment considérez-vous l’écosystème des musiques amplifiées dans la Grande Région ?
Il existe des différences de besoins et de potentiel. Notre mission première est de développer notre scène et le secteur de la musique au Luxembourg. Nous sommes partis d’un contexte essentiellement amateur. Au fil des dernières années, nous avons assisté à l’émergence de professions et professionnalisation dans les secteurs créatifs et notamment de la musique, des producteurs et musiciens et des managers. Nous constatons un élargissement des genres, un développement de la créativité et l’apparition d’activités nouvelles. Nous voulons contribuer à l’écosystème des musiques amplifiées pour permettre à ses acteurs d’en vivre. Un artiste qui crée a besoin d’un marché. Nous sommes membre du cluster des industries créatives «creativecluster.lu» au sein de Luxinnovation qui contribue à l’identification des acteurs, à la promotion et à la sensibilisation du public. Souhaitez-vous une uniformisation des pratiques pour simplifier les échanges musicaux dans la Grande Région ?
En Grande Région, nous constatons que les régions frontalières des quatre pays ont des problématiques similaires, même si les pays ont des tailles et marchés bien différents. Les problématiques musicales se posent au niveau mondial. Pour les artistes en développement, la Grande Région est une chance, car elle constitue véritablement un laboratoire de l’Europe. Elle offre la possibilité de travailler dans quatre pays peu éloignés, mais différents, et de tester leur potentiel sans prendre trop de risques. Je crois beaucoup en les initiatives des artistes. Ils savent trouver dans notre petite Grande Région le terrain de jeu qui les préparera à la grande Europe.
Propos recueillis par Pascale Braun
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