Voici un quart de siècle, Metz a épousé Gertrude. Ce logiciel de régulation du trafic a accompagné la métropole dans toutes les étapes de de son plan de circulation pour limiter les embouteillages et partager l’espace public entre l’automobile et les autres modes de transports.
A deux pas de la gare routière de Metz, les locaux discrets de la régulation du trafic du pôle Mobilité – transport de Metz métropole abritent une salle de commandes aux allures de cockpit. En fond de mur, un écran géant positionne les points névralgiques de la ville et de ses accès. Sur la droite, un deuxième écran synoptique présente un plan dynamique de l’agglomération divisée en 12 secteurs indépendants. A gauche, 14 écrans restituent en alternance les images de 38 caméras mobiles réparties sur la voierie. Coordonnées par Gertrude (Gestion de régulation en temps réel de l’urbanisme, des déplacements et de l’environnement), ces données permettent aux huit agents du poste de contrôle de surveiller le trafic et d’anticiper les bouchons, tout en alimentant un remarquable outil de simulation.
Notre programme de régulation en temps réel permet de contrôler la circulation, mais aussi de gérer l’espace et de quantifier le nombre de voieries nécessaires pour accorder de l’espace aux bus et aux vélos sans pour autant négliger l’automobile.
Dominique Loesch, ingénieur et responsable du PC Régulation du trafic de Metz Métropole
223 carrefours, 2.500 feux
Retenue en 1990 dans une ville équipée par l’allemand Siemens depuis le début de la circulation automobile, la Sem bordelaise Gertrude, qui équipe 25 villes françaises et une quinzaine d’agglomérations internationales, n’a pas ménagé ses efforts pour satisfaire son client lorrain.
Metz constitue l’une de nos références les plus importantes. Ce marché historique nous a permis de travailler sur des projets de grande ampleur et d’une grande complexité.
Guy Hayet, directeur du programme Gertrude
Dès le début du contrat, l’entreprise a fourni à la ville une interface permettant d’utiliser son système de régulation tout en conservant les automates fournis par Siemens. Gertrude a par la suite délégué un salarié à Metz pour accompagner le déploiement d’un réseau de 223 carrefours gérés par 2.500 feux, irrigués par 57 kilomètres de câbles téléphoniques et 20 kilomètres de fibre optique.
Le système de Siemens permettait déjà d’adapter la durée des feux à la circulation, passant de 50 secondes de vert en heures creuses à 100 secondes en périodes de pointe. La microrégulation proposée par Gertrude quantifie le nombre de véhicules à chaque carrefour et individualise le temps de vert de chaque feu. Aux abords de l’université, le Pont des Morts, qui absorbe la circulation de cinq carrefours adjacents, constitue un exemple probant du système. Il accueille 2.000 véhicules/heure contre une limite communément admise de 1.800 véhicules/heure. Des boucles placées à 250 mètres, à 150 mètres et au pied des feux comptent les voitures, calculent la distance qui les sépare et donnent la possibilité de récupérer du temps sur les axes les plus fluides pour les attribuer aux tronçons saturés. En gagnant deux secondes à chaque cycle, le système permet de faire passer 63 véhicules supplémentaires par heure, évitant ainsi 250 mètres de file d’attente.
Gertrude a donné toute sa mesure en 2010, lors des études préparatoires du BHNS Mettis. La Ville s’est basée sur ses simulations pour modifier le plan de circulation et requalifier au passage la place Mazelle et le boulevard Maginot en reportant une partie du trafic vers le boulevard de Trèves et la voie rapide Est. Le système de régulation permet de gérer des sas de « stockage » des voitures qui modulent la circulation comme on réglerait le débit d’un robinet pour éviter les débordements. Le boulevard de Trèves est ainsi resté fluide, et s’est même agrémenté de nouvelles pistes cyclables.
Réduction des temps de parcours
En amont du projet Mettis, le PC de régulation a produit une étude prouvant la validité de son système de régulation : entre 1993 et 2011, le temps de parcours sur l’axe dit « de Paris », au sud de la ville, a été diminué de moitié, générant une économie de carburant de 19.000 euros par an uniquement sur l’heure de pointe du matin. La démonstration a contribué à convaincre les autres gestionnaires du réseau, dont la Dir-Est, que Mettis n’engorgerait pas la circulation aux points d’entrée et de sortie des autoroutes, mais la simplifierait. De fait, la mise en service du BHNS s’est déroulée sans accroc en octobre 2013. La simulation dynamique a continué à faire ses preuves lors de l’ouverture du centre commercial Muse en décembre 2017, puis lors de la mise en service du centre des congrès en septembre 2018.
Les caméras messines comptent les voitures, mais aussi les piétons. Depuis septembre 2017, Gertrude analyse les données transmises par des caméras thermiques pour détecter le nombre de personnes stationnant sur le trottoir du boulevard Paixhans, où se croisent un flux quotidien de 24.000 véhicules et celui des collégiens et écoliers du quartier. Le temps de traversée varie entre 15 et 50 secondes, sécurisant le passage et réduisant la pollution. Le coût du dispositif se monte à 20.000 euros, contre 250.000 euros pour le réaménagement du carrefour. Le comptage par caméras thermiques s’est déployé sur d’autres points stratégiques de la ville et devrait bientôt intégrer la durée de traversée, différente en fonction de l’âge du piéton.
Au 1er janvier 2018, le passage de l’agglomération messine au statut de métropole s’est traduit par l’intégration de 53 nouveaux carrefours, dont les feux ne sont pas toujours régulés. Metz Métropole, aidé par le Céréma, consacre 200.000 euros au raccordement de 27 d’entre eux par un système radio. La téléphonie mobile constitue un apport précieux pour l’aide à la conduite des bus : il permet au poste de contrôle messin de développer avec les Transports interurbains de la Moselle un système de liaison intégrant la notion d’avance et de retard.
Allié fidèle de la circulation messine depuis un quart de siècle, Gertude se prépare à en accompagner les nouvelles étapes. Le PC de Metz Métropole planche à présent sur la piétonisation de la rue des Allemands et, à moyen terme, à la création d’une deuxième ligne du Mettis en direction du plateau de Frescaty. Cette ancienne base aérienne contiguë à la ville pourrait accueillir dans un avenir proche une base d’Amazon. Les 3.116 capteurs disséminés dans l’agglomération ne seront pas de trop pour analyser les flots de circulation supplémentaires qu’engendrera cette nouvelle base logistique.
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