Premier adjoint de la mairie de Bad-Bergzabern (Rhénanie-Palatinat) et directeur de sa régie municipale d’eau, Martin Engelhard présente le programme transfrontalier Palatinat Wasser-Eau Nature qui va renforcer le réseau d’eau commun à son territoire et à celui de Wissembourg, dans le Bas-Rhin.
Quelle est l’origine du projet Pawena (Palatinat Wasser Eau Nature) ?
Elle remonte à la fin des années 1990, lors de la découverte d’un gisement très intéressant réparti de part et d’autre de la frontière : situé en profondeur, il procure une eau d’origine ancienne, d’excellente qualité, et dont la capacité de 600 000 mètres cubes par an apparaissait comme la solution pour remédier aux problèmes réguliers d’approvisionnement que rencontre le territoire côté français autour de Wissembourg. Nous avons alors créé le Zweckverband Bad-Bergzabern – Wissembourg. Relevant à la fois des droits français et allemand, grâce à une possibilité ouverte par les accords de Karlsruhe de 1996 sur la coopération transfrontalière, il réunit quatre partenaires : la Ville de Wissembourg, le Syndicat mixte de production d’eau potable de la région de Wissembourg, le groupement de communes de Bad-Bergzabern (Verbandsgemeinde) et sa régie, Stadtwerke Bad-Bergzabern Gmbh.
Depuis quelques années cependant, des points de faiblesse sont apparus. Des canalisations sont vieillissantes ou présentent des dimensions insuffisantes sur certaines parties de réseau. La capacité de production ne suffit plus à sécuriser l’approvisionnement en eau potable et le changement climatique crée de nouveaux défis.
Dans ce contexte, le transfrontalier s’est imposé comme la seule solution : si chacun, Français et Allemand, crée sa propre source d’alimentation, nous allons prélever de l’eau en quantité disproportionnée et affaiblir la ressource à long terme. Pour préserver la ressource en eau, il nous fallait coopérer. D’où la conception du nouveau projet transfrontalier, Pawena.
Quel est le contenu de ce programme ?
Pawena se décompose en trois projets principaux. Une nouvelle conduite sera construite sur environ 800 mètres, pour 860 000 euros, entre Riedseltz (Bas-Rhin) et Schafbusch-Steinseltz (Bas-Rhin), sous la maîtrise d’ouvrage du Syndicat mixte de la région de Wissembourg. Les entreprises ont été désignées, le projet a été décalé de deux à trois mois à cause de la pandémie du coronavirus, mais nous espérons en achever les travaux d’ici à la fin de cette année. Une autre conduite sera construite l’an prochain sur le territoire de Wissembourg, entre le centre-ville et le château d’eau en périphérie, complétée d’une station de pompage pour puiser l’eau venue d’Allemagne. Son coût se montera à 960.000 euros, sous maîtrise d’ouvrage de la Ville.
L’opération la plus importante financièrement consiste en une nouvelle station de traitement et production d’eau potable à Steinfeld sur le versant allemand, sous le pilotage de notre Verbandsgemeinde, pour un montant de de 4,8 millions d’euros. Pawena représente un montant total de 7 millions d’euros, dont 2 millions d’euros de fonds Interreg, ainsi que des aides de l’agence de l’eau Rhin-Meuse en France et de son homologue SGD en Rhénanie-Palatinat. Le Zweckverband en assure le pilotage et ses membres se répartissent la maîtrise d’ouvrage. Les travaux ont démarré à l’automne 2019 et doivent se terminer fin 2021. La station pourra ainsi entrer en service en 2022 et assurer une capacité de production de 450.000 m3 par an pour l’ensemble du territoire transfrontalier.
Comment la protection de l’environnement s’intègre-t-elle à ce projet ?
La préservation des ressources naturelles est au cœur du projet. Pawena comprend un plan de gestion d’un total de 2.670 hectares de prairies, zones humides et autres espaces naturels remarquables, notamment ceux autour de la rivière Lauter, qui sont classés Natura 2000. Le programme prévoit une gestion durable de la ressource eau qui se base sur une étude Interreg IV « Länderübergreifendes Wasserversorgungskonzept Südpfalz/Nordelsass 2008 – 2030 ». Pendant les périodes de pluie, en automne et hiver, l’eau est prélevée dans les sources des Vosges du Nord et du Pfälzerwald, espace transfrontalier classé réserve de biopshère par l’Unesco. Durant cette période, les sources d’eau souterraine se reposent. La partie la plus proche de la surface est mobilisée pendant les périodes sèches, au printemps et en été. Enfin, leur partie profonde serait utilisée en cas de situation critique de déficit.
Propos recueillis par Mathieu Noyer
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