Routes : la fin du chacun pour soi
Le prochain sommet de la Grande Région, qui se tiendra le 30 juin à Sarrebruck, permettra aux représentants de la Lorraine, de la Sarre, de la Rhénanie-Palatinat, du Luxembourg et de la Walonnie de réactualiser l’ensemble des projets routiers transfrontaliers. Parmi les 26 projets répertoriés – tous modes de transport confondus – le groupe Infrastructures de la commission détaille trois dossiers franco-allemands (voir carte). Le plus avancé d’entre eux concerne le contournement de Creutzwald et Sarrelouis, évalué à 11 millions d’euros. Il associe le ministère allemand des Transports, le ministère sarrois de l’Economie, le conseil régional de Lorraine, le conseil général de Moselle, la direction régionale de l’Equipement et les communes de Creutzwald (Moselle), Sarrelouis et Uberherrn (Sarre). Côté sarrois, la construction d’un tronçon de 9,3 km a d’ores et déjà débuté pour relier Uberherrn à Sarrelouis jusqu’à l’embranchement autoroutier de l’A 620 vers Sarrebruck. En Moselle, le chantier routier franco-allemand s’engagera au début 2004. Il porte sur un tronçon de 4 km.
Des conflits d’intérêt demeurent
Ces trois projets figuraient déjà dans le premier état des lieux des infrastructures transfrontalières présenté lors du sommet de Manderen en 1997.
Dans le domaine routier, la coopération progresse forcément moins vite qu’en matière ferroviaire, où la Grande Région enregistre des progrès spectaculaires. Je constate néanmoins un acquis fondamental : les Etats intègrent désormais la dimension transfrontalière dans leurs projets – ce qui n’était pas encore le cas, en 1997, lors du débat public sur le tracé de l’A 32. Pour notre espace à vocation logistique, la réflexion sur le développement transfrontalier des infrastructures s’avère bien plus importante que les projets conduits dans le cadre français.
Jean-Claude Moretti, responsable des infrastructures au conseil régional de Lorraine et président du groupe infrastructures de la Grande Région
A la lourdeur inhérente à tout projet routier, s’ajoutent les difficultés à faire coïncider les calendriers des différents Etats partenaires.
Tout recours en contentieux côté français engendre en moyenne deux ans de retard dans les travaux. Dans l’intervalle, les Länder voisins peuvent avoir déterminé d’autres priorités, d’où des difficultés de financement.
Jean-Claude Moretti
La création de nouvelles infrastructures se heurte également à des intérêts divergents. Ainsi, la création d’un axe à deux fois deux voies permet, côté français, de faciliter les déplacements des travailleurs frontaliers. Mais la Sarre ou le Luxembourg y voient le risque de décupler le trafic de poids lourds. Le flux routier s’avère d’autant plus difficile à maîtriser qu’indépendamment de la qualité des infrastructures, le coût des péages et du gasoil joue un rôle déterminant dans les parcours. L’expérimentation d’un péage par boîtier embarqué sur les autoroutes de Rhénanie-Palatinat, jusqu’à présent gratuites, pourrait inciter les poids lourds internationaux à dévier leur itinéraire vers la France. Le faible coût du carburant au Grand Duché génère, pour certains transporteurs espagnols, des économies compensant à elles seules le salaire du chauffeur. La création de nouvelles dessertes ne peut suffire à contrer ce phénomène.
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