Vingt ans après sa création en Lorraine, le dispositif Ardan, centré sur la formation et l’accompagnement de chefs de projet au sein de petites entreprises, a fait ses preuves. Adoptée par une dizaine de régions françaises, la démarche a généré 6 500 missions et permis quelque 10 000 créations d’emploi.
Née dans les vallées vosgiennes à la faveur d’un projet européen à la fin des années 1980, l’idée de détecter, puis de concrétiser les projets dormants au sein des TPE/PME a connu un bel essor.
Dans cette région de montagnards ouvriers, nous ne nous positionnions pas dans une logique de reconversion industrielle, mais dans les prémices du développement endogène.
Jean-Claude Bouly, fondateur et DG d'Ardan
Initialement porté par la structure associative Idée Vosges, le projet a intéressé le conseil régional de Lorraine et l’Etat, qui, en 1988, ont demandé à l’association d’étendre aux quatre départements lorrains le concept d’Action régionale pour le développement d’activités nouvelles (Ardan).
Repris en 2000 par le Centre national de l’entrepreneuriat au sein du Conservatoire national des arts et métiers (Cnam), Ardan, qui constitue, aujourd’hui, une marque déposée, a conquis une dizaine de régions françaises (*), et son développement pourrait s’accélérer en 2009. Le principe consiste à confier à un demandeur d’emploi un projet de développement que la PME n’a pas les moyens de mener à bien, faute de temps ou de compétences.
Le dispositif Ardan a fonctionné car il répond de manière concrète au manque d’encadrement des PME. Le problème des ressources humaines – trouver la personne compétente et fiable pour mener à bien un projet de développement – est toujours un facteur limitant.
Jean-Claude Bouly
Réseau local
Le dispositif s’appuie sur un réseau local constitué de CCI, de pépinières d’entreprises, ou d’experts-comptables qui détectent auprès des PME des pistes de développement non exploitées.
Les cas de figure les plus répandus sont ceux de dirigeants totalement investis dans le développement commercial de l’entreprise, qui en viennent à négliger quelque peu la gestion, ou, à l’inverse, celui de patrons qui souhaitent se recentrer sur la gestion après des années de prospection.
Guy Keckhut, développeur d'Ardan
A ces deux schémas, qui représentent 80 % des projets soutenus, s’ajoutent des problématiques plus spécifiques (démarche qualité, création d’un site Internet…).
Recherche de candidats
Dans un premier temps, Ardan analyse la faisabilité du projet et formalise une stratégie. Reste, ensuite, à trouver le cadre développeur. Dans sept cas sur dix, le chef d’entreprise connaît déjà la personne à laquelle il souhaite confier le projet. A défaut, Ardan recherche des candidats
via
l’Apec ou en diffusant des offres d’emploi dans la presse. Un tiers des cadres développeurs sont des jeunes diplômés. La signature du contrat ouvre une période de « fiançailles » de six mois, durant laquelle Ardan mobilise sa méthode dénommée « Agir » pour baliser le bon déroulement du projet. En parallèle de cet accompagnement, le stagiaire suit un parcours pédagogique élaboré par le Cnam. Aux formations génériques (marketing, gestion…) s’ajoute un chéquier formation mobilisable selon les spécificités du projet (commandes numériques, graphisme…). La question de l’embauche du cadre développeur se pose, en principe, au terme des six mois. Mais, dans 80 % des cas, la personne a déjà été recrutée, pour deux tiers en CDI et pour un tiers en CDD. Les échecs sont liés soit au projet qui n’était pas valide, soit à des relations difficiles entre le chef d’entreprise et le développeur du projet.
En fonction de leur interprétation politique du dispositif, les conseils régionaux financent les programmes Ardan au titre de la formation professionnelle, de l’aide à l’emploi ou du développement économique. Le coût d’un contrat est d’environ 10 000 euros répartis à parts égales entre le conseil régional et l’entreprise, la rémunération du stagiaire représentant environ les deux tiers de la somme contre un tiers pour l’accompagnement. Un effet levier permet de mobiliser jusqu’à 5 000 euros de droits à la formation professionnelle.
La crise pourrait conduire les pouvoirs publics et les partenaires sociaux à activer encore davantage Ardan, dispositif qui a fait ses preuves.
Jean-Claude Bouly
Davantage de valeur ajoutée
Les projets labellisés Ardan auraient-ils vu le jour indépendamment de ce dispositif ? « Peut-être, mais moins rapidement et en générant moins de valeur ajoutée », répond, en substance, l’Insee Lorraine. L’institut a publié, en octobre 2007, une étude portant sur 480 programmes « cadres développeurs » conduits par Ardan au sein de 443 entreprises lorraines – dont 40 % relevant du secteur industriel – entre 1999 et 2002. L’Insee évalue à 14 %, soit 5 % de plus qu’au sein d’une population témoin, la progression de l’emploi trois ans après l’intervention d’Ardan dans une entreprise. La valeur ajoutée progresse, quant à elle, de 22,4 %, soit une différence de 8,6 % par rapport à une entreprise non aidée.
(*) Pays de Loire, Nord-Pas-de-Calais, Bourgogne, Ile-de-France, Centre, Haute-Normandie, Mayotte, Midi-Pyrénées, Provence-Alpes-Côte d’Azur et Rhône-Alpes.
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