Un septième contrat cadre entre la Région Alsace et l’agence de l’eau Rhin-Meuse alloue près de 20 millions d’euros au maintien de la qualité de la nappe phréatique du Rhin supérieur. La coopération transfrontalière a permis d’affiner les mesures et de réduire les pollutions de l’eau pour préserver ce précieux bien commun.
Signé au printemps 2015, le 7ème contrat-cadre pour la protection de l’hydrosystème rhénan reconduit pour quatre ans la coopération entre le conseil régional d’Alsace et l’agence de l’eau Rhin-Meuse. Doté de 18,6 millions d’euros, le programme englobe la protection des eaux souterraines, celle des zones humides et la gestion durable du domaine de l’Ill.
Le texte vient consacrer et amplifier 25 ans de coopération avec l’agence de l’eau.
Monique Jung, vice-présidente de la Région Alsace en charge de l’environnement
Concentré sur la rive française du Rhin, le contrat s’inscrit dans le prolongement d’une coopération avec la rive allemande formalisée en 2012. Une convention entre l’Etat, la Région, l’agence de l’eau, le BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières) et diverses instances du Bade-Wurtemberg rassemble les pilotes des outils de gestion transfrontaliers sous le vocable Logar (Liaison opérationnelle pour la gestion de l’aquifère rhénan).
80 km3 d’eau cartographiés
La première concrétisation de la coopération transfrontalière remonte à 1993 avec les premières cartes transfrontalières sur la qualité de la nappe phréatique du Rhin supérieur. Rendu possible par les fonds Interreg, le travail de cartographie hydrogéologique demeure une référence pour la connaissance de l’état de ce réservoir d’une ampleur sans équivalent en Europe : la nappe du Rhin supérieur représente 80 kilomètres cubes d’eau dans lesquels les populations et les industries d’Alsace et du Pays de Bade puisent pour leur consommation courante. Le périmètre de la cartographie s’est élargi progressivement côté allemand pour aller au-delà de Karlsruhe, jusqu’à Mayence, tandis que Bâle constitue sa limite sud. Il fait l’objet d’une réactualisation régulière. Le cinquième inventaire devrait sortir en 2016.
En parallèle de cette photographie statique, les acteurs de la coopération ont mis au point un outil dynamique : la modélisation de l’écoulement de la nappe. La technique permet de suivre l’impact dans l’espace et dans le temps des sources de pollution, une attention toute particulière étant accordée aux nitrates, aux phytosanitaires, aux chlorures et aux solvants chlorés.
Les nitrates en recul
Les nitrates sont aujourd’hui les mieux évalués et les mesures témoignent d’une amélioration, les agriculteurs ayant réduit la fertilisation chimique à l’azote. En 2006, l’outil Monit (Modélisation de la pollution des eaux souterraines par les nitrates) avait conclu que 9 % de nappe du Rhin supérieur dépassait la norme de potabilité de 50 mg/litre. Depuis, la proportion a été ramenée à 6 %.
Les concentrations maximales ont également baissé. Les pics qui atteignaient 200 mg/litre par le passé ne sont aujourd’hui plus très éloignés du seuil de 50 mg/litre.
Lucienne Gartner, chargée de mission « eaux souterraines » à la Région Alsace
Cocktails de phytosanitaires
La nappe reste néanmoins fortement imprégnée de nitrates. La « valeur-guide » européenne de 25 mg/litre correspondant à un état satisfaisant reste dépassée sur 33 % de la surface. Les points problématiques se localisent en particulier en bordure de plaine, là où la nappe est peu épaisse. La concentration naturelle de nitrates, elle, se situe entre 10 et 15 mg/litre.
La coopération s’attaque à présent à l’analyse plus en détail de transferts de phytosanitaires. Le sujet est complexe. Des molécules interdites tel l’atrazine, continuent à produire leurs effets néfastes dans la nappe dix ans après son interdiction. La dégradation de cet herbicide s’avèrent parfois aussi nocive que son introduction, voire davantage. Par ailleurs, les effets des nouvelles molécules dont l’industrie phytosanitaire inonde le marché à un rythme soutenu restent méconnus et leur combinaison avec les polluants déjà présents sont susceptibles de constituer de dangereux cocktails.
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