La loi mécénat du Grand-Duché de 1928, dépoussiérée en 2008 par Jean-Claude Junker, est moins avantageuse que la loi Aillagon. Les mécènes militent pour un assouplissement de nature à doper la culture.
Ancienne contrée paysanne et ouvrière devenue en moins d’un siècle un richissime bastion de la finance et de la recherche, le Grand-Duché du Luxembourg tente de mettre ses jeunes infrastructures culturelles au diapason. Le 29 juin dernier, Jo Kox, président du Fonds culturel national (Focuna), a présenté aux instances dirigeantes le premier plan de développement culturel du pays, qui se propose de redéfinir les missions du ministère de la Culture. La réforme du mécénat figure parmi les repositionnements préconisés.
Il faut faire preuve de plus de largesse vis-à-vis des donateurs, car l’Etat ne peut pas assumer financièrement toute la culture.
Jo Kox, président du Focuna et rapporteur du plan
Base juridique du mécénat grand-ducal, la loi du 21 avril 1928 a été dépoussiérée en 2008 par Jean-Claude Junker, alors Premier ministre. Moins avantageuse que la loi Aillagon, la réforme ne prévoit pas de crédit d’impôt, mais permet de déduire jusqu’à un million d’euros de sa déclaration dans la limite de 20 % des revenus. Fiscalistes et mécènes militent depuis dix ans pour un assouplissement de ces dispositions. Ils ont bon espoir d’être entendus par le gouvernement qui sortira des urnes après les législatives d’octobre prochain.
Sans attendre, nombre de particuliers témoignent de leur philanthropie. Créée en 2009 pour faciliter le mécénat, la Fondation de Luxembourg (FdL) chapeaute aujourd’hui 75 fondations qui financent 150 projets dans le monde entier à hauteur de 6 à 7 millions d’euros par an. Homologuée en France depuis 2017, l’institution est désormais en mesure d’accepter les donations de légataires français.
Nos donateurs sont à 80 % des familles privées qui soutiennent des projets liés à la lutte contre le réchauffement climatique et contre la pauvreté, à la santé et à l’éducation, mais aussi à la culture.
Tonika Hirdman, directrice générale de la FDL
La fintech peu présente
Présente en France et au Grand-Duché, la fondation La Mark enrichit à la fois les collections du château de Versailles, du Louvre et du Musée national d’histoire et d’art luxembourgeois, tandis que la fondation Eté accorde deux bourses par mois à de petits projets culturels et que Loo et Lou s’impliquent depuis 2013 dans le programme Art Freak : cette série d’ateliers permet à des adolescents de créer et d’exposer au Mudam, le musée national d’art contemporain.
Dès son ouverture en 2006, le Mudam s’est appuyé sur le mécénat, qui lui apporte chaque année environ 600 000 euros hors donations, soit 6 % de son budget.
Pour les entreprises, il s’agit d’un choix stratégique qui leur permet de s’associer à l’image de modernité que véhicule le musée.
Annick Spautz, responsable mécénat et événements du Mudam
Sous l’impulsion de sa nouvelle directrice, Suzanne Cotter, le Mudam prépare pour la fin de l’année plusieurs expositions d’envergure internationale auxquelles devraient s’associer les groupes mondiaux implantés au Luxembourg.
Les start-up, et tout particulièrement les fintech, pourtant foisonnantes, restent encore peu présentes dans le mécénat institutionnel. La désignation, début 2018, d’Esch-sur-Alzette, jeune agglomération grand-ducale frontalière de la Lorraine, comme capitale européenne de la culture en 2022, pourrait changer la donne.
Esch 2022 constitue l’occasion de réaffirmer l’identité artistique et culturelle du pays et de la ville, qui constitue un magnifique terrain de jeu multiculturel.
Raphaël Bonfiglioli, CEO de OWL Advisory SA, cabinet de conseil aux entreprises spécialisé dans l'art
En 2007, la désignation de Luxembourg comme capitale culturelle avait contribué au rayonnement du Grand-Duché et à certains de ses mécènes. En 2022, Esch pourra faire miroiter son université toute neuve et l’étrange décor de ses hauts-fourneaux devenus creusets de science. La Lorraine espère ne pas être en reste et étudie les pistes d’un nouveau mécénat culturel transfrontalier.
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