Sur le site d’Hambach, le constructeur de la Smart Fortwo bascule progressivement aux 39 heures payées 37, tout en réduisant la production.
Les journalistes étaient nombreux, le 3 octobre, devant les portes de l’usine Smart France à Hambach (Moselle) pour assister à une prise de poste hautement symbolique. Au terme de quinze mois de négociations tourmentées, les 800 salariés sont entrés dans une période de modulation qui les conduira progressivement à travailler 39 heures par semaine, moyennant une baisse de 6 % du salaire horaire.
Cette hausse du temps de travail coïncide paradoxalement à un ralentissement de la production. Smart France, qui tablait, lors de la présentation du Pacte 2020, sur un décollage en flèche de son nouveau modèle Fortwo, produit en partie en partenariat avec Renault, a dû réviser ses projections à la baisse. Le site ne produira cette année que 90.000 véhicules, contre 100.000 l’an dernier, très loin des 120.000, voire 150.000 véhicules évoqués lors du lancement.
Raté industriel
Cette déconvenue tient en partie à un raté industriel : durant les six premiers mois, le constructeur a dû équiper ses nouveaux véhicules de boîtes de vitesses manuelles, avant de revenir à des boîtes automatisées. La direction du site se veut toutefois plus optimiste pour 2017. « Nous tablons sur un volume de production d’environ 100.000 véhicules l’an prochain », indique un porte-parole de la société.
« Nous nous trouvons dans une situation absurde où nous travaillons plus pour produire et gagner moins. »
Ce démarrage difficile se traduira dès ce mois d’octobre par un ralentissement du cycle de la production et par la non-reconduction d’une soixantaine de postes d’intérim.
Le Pacte 2020 aurait pu être judicieux pour accompagner une augmentation de la production, mais nous nous trouvons aujourd’hui dans une situation absurde où nous travaillons plus pour produire et gagner moins.
Patrick Hoszkowicz, délégué syndical central CFDT de Smart France
Le syndicat n’exclut pas de se joindre d’ici à la fin de l’année au droit d’alerte que prône la CGT.
Profondes dissensions en interne
Le Pacte 2020 aura créé de profondes dissensions tant entre syndicats qu’entre corps de métier. En septembre 2015, le référendum organisé par la direction s’était soldé par 56 % de votes en faveur des 39 heures, mais 60 % des ouvriers avaient répondu par la négative. Pour éviter des procédures judiciaires, la direction a demandé aux salariés de signer un avenant à leur contrat de travail – sur fond de risque de délocalisation du site mosellan en Slovénie.
Fin 2015, 90 % des salariés avaient ratifié cet avenant.
Les gens regrettent d’avoir signé : en un an, le site est passé de 145 à 79 postes d’intérimaires, sans aucune garantie sur l’avenir du site au-delà de 2020.
Samir Boualit, délégué CGT du personnel
Implantés sur le site même de « Smartville », les six sous-traitants de la Smart ont emboîté le pas à leur donneur d’ordres. Leurs quelque 800 salariés effectuent déjà 37 heures de travail hebdomadaires et devront calquer leurs horaires sur ceux de Smart France lorsque entreront en vigueur les sorties de poste à 23 heures et les 20 samedis travaillés. Mais ils seront rémunérés en heures supplémentaires majorées, à la différence de leurs collègues de Smart France.
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