Pour ses futurs apprentis venus d’Alsace, le centre de formation du sidérurgiste BSW de Kehl a mis en place une année préalable d’enseignement d’allemand. L’initiative les met à niveau pour rejoindre le parcours de formation qui mène à l’embauche.
Yassine, Yoann, Jérôme et leurs cinq camarades ont trouvé leur seconde chance professionnelle de l’autre côté du Rhin. En recherche vaine d’un emploi stable, les huit jeunes Alsaciens ont intégré depuis octobre dernier le centre d’apprentissage BAG rattaché à l’aciérie BSW (Badische Stahlwerke) à Kehl, en face de Strasbourg. Le chemin sera long – quatre ans et demi au total – mais si tout se passe bien, il débouchera sur un CDI.
Après trois ans de chômage, j’ai appris à être patient ! Là, je sais qu’il y a du boulot.
Yassine, stagiaire au BAG
Côté français, leur CAP d’électricien, leur BEP ou leur bac pro en usinage ou en informatique ne leur ont pas permis de décrocher mieux que de l’intérim. Alors, la perspective d’une embauche ferme les motive. Yoann ne regrette pas d’avoir totalement bifurqué de la voie du bac littéraire, ni Thomas de faire le long trajet tous les jours depuis Seebach, à l’extrémité nord de l’Alsace. La perspective de travailler en Allemagne leur convient. Plusieurs vivent l’expérience par procuration avec des parents ou proches eux-mêmes travailleurs frontaliers. « On voit que ça fait vivre la famille depuis vingt ans », appuient-ils.
Un an de pré-qualification
Mais pour cela, il leur faudra apprendre ou retrouver le minimum de bagage en langue allemande de la vie courante et du quotidien de l’usine. Il leur faudra aussi confirmer leur motivation. Tels sont les deux objectifs de la « pré-qualification » d’un an qu’ils ont démarrée à la BAG. Ce parcours préalable a été aménagé sur mesure pour les apprentis alsaciens qui s’engageront ensuite dans 3 ans et demi de cursus technique classique au sein de la BAG. Ils obtiendront ensuite en deux étapes des diplômes de mécanicien industriel et de technicien des procédés, reconnus nationalement en Allemagne. La construction de la phase préalable résulte de la rencontre entre BAG, la Mission locale pour l’emploi de Strasbourg, la Maison de l’emploi de Strasbourg, la Région Alsace et la Bundesagentur für Arbeit, équivalent allemand de Pôle emploi. Ces trois dernières structures se répartissent les 580 euros de coût mensuel par apprenti.
Bilinguisme et motivation
Avant même le début de la pré-qualification, les partenaires ont multiplié les visites de la BAG, de la BSW et d’autres entreprises métallurgiques dans le cadre de stages d’immersion et d’évaluation sommaire de l’aptitude professionnelle.
Il s’agissait de bien s’assurer de la motivation des candidats. Les intégrer est un investissement : nous finançons intégralement les 3 ans et demi de notre cursus standard, ce qui représente 75 000 euros par apprenti.
Bernd Wiegele, le directeur du centre BAG
L’apprentissage a débuté par un mois exclusivement consacré à l’apprentissage de l’allemand dans un organisme de formation installé à Kehl. Les cours d’allemand se sont ensuite poursuivis de façon intensive à la BAG pendant un peu plus d’un mois, en alternance avec un début d’apprentissage technique. L’aciérie a ressenti très concrètement l’effet de la moindre maîtrise de la langue de Goethe par les Alsaciens : en dix ans, les frontaliers français sont passés de 120 à 60, alors que l’effectif total est resté constant à 850 personnes.
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