Les peintres et les carreleurs ont leur “carnet de santé”
Cette entreprise de finition a réalisé un diagnostic puis rédigé des fiches individuelles de pénibilité pour ses 220 salariés. La démarche s’est appuyée sur une documentation diversifiée et des questionnaires soumis aux salariés.
Anticipant l’obligation prévue dans la loi de novembre 2010 sur la réforme des retraites, l’entreprise de peintures et de finitions Lagarde & Meregnani basée à Maxéville (Meurthe-et-Moselle) a réalisé en interne un diagnostic auprès de ses 220 salariés, puis établi des fiches individuelles d’exposition à la pénibilité. Exhaustive, la démarche englobe les employés de bureau, les mécaniciens, le personnel de maintenance, et s’attache à cerner les risques spécifiques à l’activité des peintres d’intérieur et des façadiers, qui travaillent les bras en l’air, et des soliers, qui posent à genoux les sols durs et souples.
Les risques étaient déjà consignés dans le document unique, qui mentionne les postures forcées. Le diagnostic ne comportait donc pas de révélations, mais il représente une base utile pour constituer un outil pérenne. Les fiches individuelles de pénibilité nous ont permis d’anticiper les obligations légales, mais aussi d’orienter nos actions de prévention et de formation sur les gestes et postures
Jean-Marc Robin, directeur administratif et financier de l’entreprise
Des sources fiables et variées
Lagarde et Meregnani a confié à une stagiaire, Élise Lhomme, alors étudiante en première année du master gestion des ressources humaines à l’IAE de Nancy, qui y a consacré dix semaines, l’élaboration du diagnostic et des fiches individuelles d’exposition. « N’ayant pas de formation médicale, je n’étais pas légitime pour évaluer quelles étaient les postures et situations pénibles. Je me suis donc appuyée sur des sources légales et sur des bases documentaires sûres et variées », indique la jeune femme. L’étudiante a puisé dans les accords nationaux du BTP du 20 novembre 2011, dans le document unique de l’entreprise et dans la documentation fournie par l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS) pour élaborer ses propres questionnaires.
Elle a aussi consulté les enquêtes « Surveillance médicale et exposition aux risques » (Sumer), vaste étude transversale copilotée par la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) et l’Inspection médicale du travail, qui décrit les contraintes organisationnelles et les expositions professionnelles de types physique, biologique et chimique auxquelles sont soumis les salariés.
Un travail de terrain
Aux tâches de recherche a succédé un travail de terrain. Bien accueillie, la jeune femme a soumis son questionnaire aux salariés et aux chefs d’équipe. Les fiches de pénibilité ont été amendées en fonction de la fréquence et de l’intensité des risques de pénibilité. Ainsi, le façadier n’est soumis aux températures extrêmes qu’en cas de canicule, de même que l’exposition au bruit du chantier est variable et ponctuelle. Le travail a débouché sur un rapport validé par le CHSCT de l’entreprise, puis sur la remise des fiches de pénibilité à la médecine du travail. Le rapport a également alimenté le mémoire que l’étudiante avait choisi de consacrer à la pénibilité.
Mise à jour chaque année, la fiche individuelle de pénibilité suit le salarié tout au long de sa carrière et lui revient de plein droit lorsqu’il quitte l’entreprise. « Plus qu’une simple formalité, ce document constitue une véritable protection pour le salarié. Reste à voir si les données seront réellement utilisées et si elles ne risquent pas d’être surexploitées en imputant trop de responsabilités aux employeurs », analyse Sylvie Petiot, directrice générale de Lagarde & Meregnani. Également présidente de la Fédération française du bâtiment de Lorraine, la dirigeante pointe entre autres l’exemple d’anciens auto-entrepreneurs qui reviendraient au salariat. Or, aucun document ne consigne les situations de pénibilité auxquelles l’ex-travailleur indépendant a pu s’exposer durant cette partie de carrière.
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