Titulaire d’un master professionnel Politiques culturelles obtenu à Paris VII, Jenny Lippmann dirige depuis début 2017 la rédaction du média numérique szenik.
Issu d’un projet Interreg, cet agenda culturel bilingue français-allemand complété par un magazine web couvre l’actualité culturelle de Bruxelles à Zurich. La jeune Allemande évoque avec enthousiasme la richesse de cette vaste scène transfrontalière.
Sur quels critères sélectionnez-vous les spectacles cités dans szenik ?
Nous privilégions les créations en régions et les coproductions entre salles transfrontalières. La sélection est effectuée par des passionnés des arts vivants : les trois permanents du site, mais aussi des correspondants bénévoles, étudiants, anciens journalistes ou experts, qui fréquentent les spectacles et font partager leur envie de découverte. Nous ne nous contentons jamais des dossiers de presse pour rédiger nos articles : notre objectif est d’inviter à une vraie rencontre.
Nous sommes également en contact avec les salles. Nous avons conclu des partenariats avec plusieurs d’entre elles. Les publicités et les focus que nous consacrons à certains festivals, ainsi que les subventions que nous accordent la région Grand Est, la Drac du Grand Est et la Fondation rhénane pour la culture, nous ont permis de pérenniser szenik au-delà du projet Interreg, qui s’est achevé en 2015. La création du Grand Est a considérablement étendu notre territoire. Dans le Grand Est transfrontalier, les arts vivants se trouvent dans une période charnière. Le financement de szenik n’est pas toujours facile, mais cette nouvelle structuration nous incite à l’optimisme.
Vous êtes les témoins de la vie culturelle dans un espace englobant quatre pays. Cette scène transfrontalière vous paraît-elle morcelée ou en voie d’unification ?
C’est une question que nous nous posons tous les jours. Nous baignons à la fois dans les spectacles et les programmations et dans la vie des salles. Les coopérations se nouent petit à petit, même si elles prennent beaucoup de temps. Nous voyons ainsi ses rapprochements et des coproductions entre le Carreau à Forbach et le Staatstheater de Sarrebruck, la Manufacture à Nancy et le Badisches Staatstheater Karlsruhe dans le cadre du festival Ring ou encore, le théâtre de Fribourg qui consacre depuis cette saison des focus aux artistes belges et français. Nous assistons à une volonté de structurer la création et la diffusion à l’échelle du Grand Est et es pays voisin.
Le public accompagne-t-il cette mutation ?
Il faut une organisation pour cela. Il existe déjà des échanges entre clubs de spectateurs, des navettes ou des abonnements communs. Le format des festivals facilite la mobilité du public : un festival de plusieurs jours est plus attractif qu’un spectacle unique qui se tient un mardi à Bruxelles, lorsque l’on habite à Strasbourg et que l’on sait qu’il n’y aura pas de train pour rentrer !
Quelles sont les manifestions culturelles phares de la Grande Région ?
Il n’y a pas une manifestation phare, mais un grand nombre de valeurs sûres, qui permettent aussi de faire découvrir la particularité des régions ou des villes. Je citerai de manière subjective et non exhaustive le festival mondial de marionnettes de Charleville-Mézières, la Magnifique Society à Reims, Perspectives en Sarre et dans l’Est mosellan, la biennale internationale Corps-objet image Les giboulées à Strasbourg, le festival XS du théâtre national Wallonie-Bruxelles, le festival de danse Steps en Suisse…
Nous sommes toujours éblouis par la créativité de la Grande Région. Quels que soient ses goûts, chacun peut y trouver un spectacle à apprécier. Notre club szenik offre des invitations à ses membres dans plusieurs salles de la région transfrontalière. Lorsqu’un habitant de Reims est invité à un spectacle à Karlsruhe, il partage avec les participants allemands une même émotion, et les uns et les autres se fabriquent des souvenirs communs, sans que la langue ne soit un obstacle. L’art vivant peut créer ces moments très particuliers. Dans ce domaine, notre région présente plus de diversité que les autres et il serait dommage de s’en priver.
Propos recueillis par Pascale Braun
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