Vice-président de la Région Alsace en charge de la coopération transfrontalière, Jean-Marie Belliard juge plus dynamique la nouvelle approche du programme Interreg-V (2015- 2020) dont la collectivité assume la gestion.
Les fonds européens Interreg-V s’élèvent à 109,7 millions d’euros pour le Rhin supérieur jusqu’en 2020. Ce montant vous satisfait-il ?
Oui, il correspond à ce que nous avions demandé et il représente une hausse significative de quelque 60 % par rapport à Interreg-IV. J’avoue que nous n’en avons pas vraiment identifié la raison. En tout cas, c’est un contre-argument à « l’Europe-bashing » : cela prouve que nos régions de la « vieille » Europe occidentale ne sont pas oubliées.
Sur quels critères les aides vont-elles être attribuées?
L’Union européenne nous demande une vigilance particulière sur deux points : le caractère novateur et l’effet durable. Le premier point signifie qu’Interreg n’est pas là pour financer le fonctionnement basique d’une structure ou pour boucler un budget… quand bien même la tentation peut être grande dans le contexte financier ô combien tendu de nos collectivités locales. Pour qu’une structure ou un projet existant continue à bénéficier de ces aides, il faut démontrer que sa poursuite apporte quelque chose de nouveau. Le deuxième point a un intitulé qui ne va pas de soi : « le caractère durable à effet structurant ». En allemand, on dirait qu’il ne doit pas s’agir d’une « Schnapsidee », d’une idée fumeuse…
A contrario, le nouvel Interreg ne doit pas s’interdire de mettre le paquet, à hauteur de plusieurs millions d’euros, sur certains projets identifiés comme majeurs. Pour nous, ce peut être le Campus européen et le soutien à la formation transfrontalière « Réussir sans frontières ». Il en découle une logique de déplafonnement : si un projet le justifie, il doit être soutenu à bien plus de 50 %. En moyenne, le taux de cofinancement de notre programme dans le Rhin supérieur atteint d’ailleurs 52 % d’un total de 210,6 millions d’euros de projets. Interreg devient aussi plus flexible : on ne fige pas une maquette financière sur cinq ans de programmation : on se garde la possibilité de soutenir des projets qui n’ont pas encore émergé aujourd’hui.
Quelles sont les thématiques prioritaires ?
Le programme se décompose en cinq axes. Nous nous mobilisons sur le volet recherche scientifique, notamment par le projet « Offensive Sciences » qui fonctionne selon des appels à projets pilotés par les experts. La protection de l’environnement se situe dans la continuité des précédents programmes. L’ « offre de services transfrontalière » soutiendra en priorité les initiatives et structures qui apportent des informations aux frontaliers, telles Infobest, et des micro-projets locaux concrets. Le volet emploi/économie/formation comprend notamment la dimension fondamentale du bilinguisme.
Le dernier enjeu majeur est celui des transports. Le Rhin supérieur a besoin de plus de fluidité : on a coutume de rappeler qu’il y a plus de ponts sur le Rhin à Cologne qu’entre Bâle et Cologne ! Mais nous savons tous que l’argent public se fait rare pour réaliser des infrastructures. En revanche, nous pouvons agir sur la création de services souples de transport à la demande, l’amélioration des correspondances, la compatibilité de la billettique et sur le matériel. Au stade du renouvellement, nous pouvons intégrer dans le cahier des charges la compatibilité de circulation de l’autre côté de la frontière.
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