L’ex-secrétaire national de la CFDT revendique la culture du compromis et estime que le concept de lutte des classes rend aveugle.
Quelques mois avant de quitter ses fonctions de secrétaire général de la CFDT, Jean-Louis Malys a commencé à coucher sur le papier les réflexions parfois indignées que lui inspirait l’adoption tumultueuse de la loi El Khomri. D’abord focalisé sur les profondes divergences entre réformistes et contestataires apparues lors de l’été 2016, le propos a largement débordé de son thème initial pour aboutir à un essai libre et sincère. « Agir pour un idéal imparfait » (1) revient sur les origines des clivages syndicaux français, puis s’ouvre aux problématiques contemporaines de l’engagement citoyen.
Ex-militant maoïste, Jean-Louis Malys tacle sévèrement la CGT, à laquelle il a adhéré en 1974, avant de cofonder la CDFT des hauts-fourneaux d’Uckange (Moselle). Il voit dans la prééminence de la notion de lutte de classes un aveuglement dogmatique, dénonce la tentation de la violence et se défend des accusations de connivences portées contre la CFDT. Réformiste assumé, il renvoie dos à dos « ceux qui ont comme ennemi commun le compromis » et prône une implication collective dans la stratégie de l’entreprise. Il dépeint non sans ironie le rituel de la « grève-reine », auquel il préfère les négociations à froid.
En dépit de ces divergences, Jean-Louis Malys constate que sur le terrain et même dans les instances nationales, les dirigeants syndicaux s’entendent plutôt bien et se respectent. Il en déduit qu’une unité syndicale ponctuelle reste possible et préfère voir dans les débordements de la contestation de la loi Travail « l’écume visible d’une société hystérisée et dépressive qui se complait dans le pessimisme ».
Résolument optimiste, le jeune retraité préfère « offrir des perspectives et de l’espoir plutôt que des constats d’impuissance ». La maxime vaut autant pour le combat syndicat que pour l’engagement sociétal. Impliqué dans la rédaction du texte « Vivre ensemble, travailler ensemble » cosigné par sept organisations syndicales (2) dans la foulée des attentats contre Charlie Hebdo, Jean-Louis Malys rend hommage aux syndicalistes dépeints comme des acteurs de l’éducation populaire et des exemples d’ascension sociale. Témoignage de l’érudition militante, l’essai constitue une ode à la tolérance, au respect, à l’antiracisme et à la laïcité. Les jeunes générations de syndicalistes y trouveront des repères historiques, des portraits de leurs aînés et l’esquisse d’un idéal imparfait, mais vivable, et parfois même heureux.
(1)Editions de l’Aube, 2017, 193 pages, 18,90 euros.
(2) CGT, CFDT, CFTC, CFE-CGC, Unsa, FSU et Solidaires.
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