Sur les routes du livre
Le directeur de la médiathèque des Alpes-Maritimes ne cesse d’explorer le monde. Amoureux du livre et des voyages, Jean Buathier s’est mis à écrire.
A lui seul, le bureau du globe-trotter constitue un voyage. Sur trente mètres carrés, le directeur de la médiathèque départementale des Alpes-Maritimes a réuni des centaines de pièces splendides et mystérieuses dont il connaît d’autant mieux l’histoire et la provenance qu’il les a rapportées des confins de la planète.
« Je suis Monsieur Tout le monde », affirme, contre toute évidence, Jean Buathier, la cinquantaine juvénile et l’abord chaleureux. Un Monsieur Tout le monde qui serait allé jusqu’au bout de la Terre et en serait revenu pétri de savoirs et toujours affamé de nouveaux horizons.
Explorateur de frontières. Dès l’adolescence, le Jurassien partage la quête de découverte qui anime les routards des années 70. A 16 ans, il tombe amoureux de la Finlande où il se rendra à dix-sept reprises. A 17 ans, il part sur les traces de Tintin au Tibet. Coup de chance, la région du Ladakh, ancien royaume divisé entre l’Inde, le Pakistan et la Chine, vient d’ouvrir ses frontières pour la première fois depuis l’ère maoïste. L’adolescent s’y rue, explore les frontières naturelles et culturelles entre les mondes bouddhiste et musulman. Il en rapporte une calligraphie tibétaine qu’il trouve si jolie qu’il s’inscrit, dès son retour, à l’Institut national des langues et civilisations orientales de Paris pour apprendre à la décrypter. Dans la foulée, il étudiera le turc et le finnois.
Jean Buathier est également un bâtisseur capable d’élaborer sur le long terme des projets structurants.
Je compte parmi les tout premiers cadres A de la fonction publique territoriale. Ma carrière de conservateur a commencé au début de la décentralisation. Les agents de l’Etat en redoutaient les conséquences. Les élus, en revanche, m’ont fait confiance, me laissant toute latitude pour construire une politique de lecture publique.
En Moselle, où il exerce durant dix ans, il remplace les traditionnels bibliobus par quatre grandes bibliothèques desservant l’ensemble du territoire.
C’est à Metz que germe l’idée de son épopée la plus extraordinaire la découverte de la réserve de l’Altyn Tagh. Située dans les steppes de haute altitude de l’Arka Tachn, aux frontières de la Chine et du Grand Nord tibétain, la zone est à ce point perdue que les derniers récits de voyageurs remontent à 1935. Le conservateur trouve pourtant la trace de deux autres expéditions tentées à grands frais par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) et le World Wildlife Fund (WWF) dans les années 80. Durant trois ans, Jean Buathier étudie les récits des grands explorateurs. Paru en 2004, son ouvrage « Aux confins de la Chine » (éditions Arthaud) retrace une aventure fabuleuse où alternent angoisse et émerveillement.
Une politique d’expertise
« Toutes les manières de voir le monde sont bonnes, pourvu qu’on en revienne », notait Nicolas Bouvier. Jean Buathier est donc revenu de Chine, de même qu’il est revenu d’Anatolie, de Nouvelle-Guinée, de la banquise du détroit de Barrow ou du bush australien. Muté à Nice voici cinq ans, il conduit dans les Alpes-Maritimes une politique d’expertise et d’ingénierie culturelle basée sur la confiance et le travail d’équipe. Le montagnard, qui a mémorisé en quelques semaines les failles et les vallées de la région, met ses congés à profit pour partir bien plus loin. Ses derniers voyages l’ont conduit en Iran et lui ont inspiré son premier roman, « La Route de Bishapour ». Les gorges et les grottes de ce site archéologique persan ne pouvaient qu’enflammer l’imagination du voyageur.
BIO-EXPRESS
- 1958 : naissance à Lons-le-Saunier (Jura).
- 1984 : conservateur à la bibliothèque départementale du Territoire de Belfort.
- 1989 : directeur adjoint, puis directeur de la bibliothèque départementale de prêt de la Moselle.
- Juin-juillet 2002 : parcourt la Chine.
- 2003 : directeur de la médiathèque départementale des Alpes-Maritimes.
- 2009 : s’apprête à publier « La Route de Bishapour ».
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