Six laboratoires du Grand Est, dont l’Inrae, entendent faire réémerger la pratique ancestrale du gemmage, qui consiste à « saigner » des résineux pour extraire de leur gemme des molécules de grand intérêt. Le programme de recherche ExtraFort_Est, qui réunit les acteurs régionaux de la chimie du bois, a achevé à la mi-septembre ses premiers tests sur une trentaine d’arbres de cinq essences.
La térébenthine des Vosges n’est plus qu’un lointain souvenir, mais six laboratoires du Grand Est entendent faire réémerger la pratique ancestrale qui consiste à « saigner » des résineux pour extraire de leur gemme des molécules de grand intérêt.
Le programme de recherche ExtraFort_Est, qui réunit les acteurs régionaux de la chimie du bois, a achevé à la mi-septembre ses premiers tests sur une trentaine d’arbres de cinq essences – sapin, douglas, pin sylvestre, épicéa et mélèze – largement représentées dans les forêts lorraines. Le pin sylvestre tient la corde : la méthode développée par le laboratoire bourguignon Holiste a permis de récupérer l’équivalent d’un bol de résine en pratiquant une blessure circulaire peu profonde. Le mélèze pourrait aussi être exploité selon la technique du « bore hole », qui puise dans les canaux résinifères du coeur de l’arbre.
La tradition du gemmage s’est quasi perdue, mais elle permettrait de s’affranchir des ressources pétrolières en proposant un produit très pur, de grande valeur et aux usages multiples.
Francis Colin, directeur de recherche à l'Inrae et coordinateur de Gemm_Est
Le pin sylvestre s’avère certes moins productif que son cousin maritime, mais il peut fournir un à deux kilos de gemme par an. Les forestiers du Grand Est s’intéressent déjà à cette possibilité de valoriser des arbres difficiles d’accès ou d’en prélever la résine durant les trois ans précédant la coupe.
Pinène et colophane
La gemme fournit de la térébenthine , généralement issue des liqueurs noires venues de l’industrie papetière, qui entre dans la composition des produits d’entretien, encaustiques ou insecticides. Elle contient des alpha-pinènes, qui contribuent à fixer l’oxygène dans le sang, et des bêta-pinènes, connus pour leurs vertus antiseptiques. Résidu solide obtenu après distillation de la térébenthine, la colophane sert entre autres d’enduit glaçant pour les peintures artistiques, d’adhésif ou de décapant.
Les recherches ethnologiques de Gemm_Est indiquent que le gemmage reste pratiqué à l’échelle artisanale en Aquitaine et dans le sud de l’Europe. Le Brésil et la Chine cultivent des résineux sur un mode industriel, mais le marché chinois absorbe désormais l’essentiel de sa production. Le gemmage en circuit court conserve donc toutes ses chances.
Le projet Gemm_Est
Lancement : octobre 2019
Porteur : Inrae Grand Est
Budget : 140.000 euros sur deux ans
Secteur : chimie du bois
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