La commissaire générale du Livre sur la Place ouvre la quarantième édition du salon nancéien et s’apprête à intégrer l’académie Goncourt en tant que déléguée générale.
L’ancienne journaliste est restée très pro. Mercredi, sur le plateau d’Anne-Sophie Pierson, dans les studios de la télévision ViaMirabelle, Françoise Rossinot, commissaire générale du « Livre sur la Place », détaille avec précision le programme. La quarantième édition de la manifestation démarre ce vendredi à Nancy.
Le cru s’annonce exceptionnel : les dix académiciens du Goncourt présideront l’événement. Et pour la première fois, il délaisseront les tables de Drouant pour délibérer dans les salons de l’hôtel de Ville nancéien avant de dévoiler la liste des nominés du prix depuis la place Stanislas.
En prélude, le rideau s’est levé jeudi soir sur la lecture, par la comédienne Alice Taglioni, de textes de Jean d’Ormesson choisis par sa fille Héloïse. Il tombera, dimanche, après l’interprétation par Isabelle Adjani et Lambert Wilson de la correspondance entre Albert Camus et Maria Casarès. Dans l’intervalle, les 175.000 visiteurs attendus auront pu rencontrer 200 écrivains et assister à une centaine de débats et d’entretiens.
Concise et quasi-exhaustive sur le déroulé du week-end, Françoise Rossinot tait, en revanche, le rôle qu’elle a joué pour hisser le salon lorrain au rang d’événement national. De même, elle passe rapidement sur sa prise de fonction imminente : elle est la nouvelle déléguée générale de l’Académie Goncourt.
En annonçant son arrivée, le président de l’académie Bernard Pivot a salué « sa formidable connaissance du milieu littéraire, de la presse littéraire et de l’édition » ou encore « ses qualités humaines de bienveillance et d’attention aux autres ».
Des louanges que cette mère de famille accueille avec retenue.
Le Goncourt constitue un événement littéraire immense qui n’a pas besoin de moi pour être mis en lumière. Je serai là pour écouter les membres de l’académie, les servir, voir ce qu’ils auront envie de développer.
Françoise Rossinot
La modestie n’est pas feinte. La sexagénaire blonde, mise impeccable, ne cache pas sa crispation lorsqu’il s’agit de se dévoiler. Epouse d’André Rossinot, maire de Nancy durant 31 ans, puis président de la métropole du Grand Nancy, ex-ministre et ex-député, l’ancienne journaliste à « L’Est républicain » a appris tant par la presse que par la politique à plutôt faire parler. Elle revendique la réserve. Tout au plus, milite-t-elle, à ses heures contre la souffrance animale.
En 1983, Françoise Rossinot est devenue la directrice de la communication de son époux, de 15 ans son aîné, mais elle n’a pas voulu se contenter d’être « la femme de ». La littérature a permis à cette fille de libraires de Grasse de maintenir sa pratique des interviews, d’entretenir son érudition et de contribuer à la vie culturelle de Nancy, sa ville d’adoption.
En 1994, elle lance les Rencontres du Livre sur la Place, qui convient, tous les deux mois, un auteur à débattre avec son public. « Mon premier invité, Elie Wiesel, est venu spécialement de New-York à Nancy.
Ce moment fut inoubliable. J’entends encore sa voix particulière, si douce et mélancolique lorsqu’il parlait de ces trains que l’on n’a jamais arrêtés.
Françoise Rossinot
L’organisatrice est restée en contact avec le Prix Nobel de la Paix jusqu’à son décès et a noué des amitiés durables avec d’autres grandes consciences dont Jorge Semprun et Jean d’Ormesson.
Pour son dernier « Livre sur la Place » en tant que commissaire générale – fonction qu’elle assume depuis 2007 -, Françoise Rossinot est fière d’accueillir des stars telles Salman Rushdie, Amélie Nothomb ou Guillaume Musso. Mais elle se réjouit au moins autant d’une autre mission discrète et primordiale, qu’elle a impulsée pour rapprocher la littérature ceux qui en sont coupés.
Tout au long de l’année, le « Livre sur la Place » se décline en un travail de terrain dans les écoles, au pied des immeubles, dans les maisons de retraite ou les prisons. Le nancéien Philippe Claudel s’est ainsi rendu durant plusieurs années au centre pénitentiaire de la ville dont il a tiré le livre « Le bruit des trousseaux ». En lien avec le bailleur social OMh, Daniel Picouly a lancé des « battles » de lecture dont les finales rassemblent Place Stanislas des collégiens de la banlieue de Nancy.
Restée journaliste dans l’âme, Françoise Rossinot assure trop respecter les auteurs pour franchir elle-même le cap de l’écriture. Hormis pour transmettre des informations littéraires. Elle admet néanmoins un regret.
Je n’ai rien noté des années de vie politique passées aux côtés de mon mari, quand François Mitterrand ou Jacques Chirac appelaient le soir à la maison. J’aurais pu laisser une trace de cette époque et de ces personnages.
Françoise Rossinot
Même dans ce cas, cette cette femme de lettres aurait certainement évité de se mettre au grand jour.
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