Cofondateur du hub social familial Hakisa, Eric Gehl déploie des solutions de Smart Home, de Smart Care et de Smart Services auprès de bailleurs, d’associations d’aide à domicile et de collectivités. La start-up de sept salariés implantée à Meisenthal (Moselle) connecte 22 000 personnes âgées en Alsace, en Lorraine et en Allemagne.
Quel modèle économique avez-vous mis en œuvre ?
Nous vendons des applications distinctes sur le modèle du B to B : nous vendons nos solutions à des opérateurs à des tarifs dégressifs qui varient entre 2 euros et quelques centimes par mois en fonction du nombre d’abonnés et de l’offre de services. Notre solution Smart Home s’appuie sur les équipements électriques de la société Hager et s’adresse à des bailleurs sociaux, à des résidences services et à des maisons de retraite. Nous participons à une expérience pilote conduite par le département de la Moselle et le bailleur SNI-Sainte-Barbe, qui gère l’ancien parc immobilier des Houillères du bassin de Lorraine, en équipant le « papy-loft » de Rouhling. En Alsace, nous avons passé une convention avec les associations d’aide à domicile Abrapa dans le Bas-Rhin et Apa dans le Haut-Rhin pour développer une solution Smart Care. L’opérateur de services Facilien s’adapte aux besoins des personnes âgées ou fragilisées et à ceux de la famille et des aidants. Nous étudions également avec la Poste une solution de Smart Services qui met une plateforme technologique à disposition d’une communauté citoyenne investie dans l’accompagnement des personnes âgées.
Quels avantages trouvez-vous à un positionnement alsaco-lorrain à la fois rural et frontalier ?
Ils sont nombreux. Le pays de Bitche est desservi par le réseau à haut débit Tubeo qui peut permettre d’initier des expérimentations pilotes en milieu rural. Nous sommes à proximité de Blieskastel, en Sarre, où se situe le siège social de notre partenaire Hager, très actif en Allemagne. Etant nous-mêmes frontaliers et bilingues, nous avons développé notre activité dans deux Länder allemands, dont la Sarre. Nous sommes également à cheval entre l’Alsace et la Lorraine. Cette position nous donne une vision élargie de la Silver économie. La Lorraine aborde la question à travers le prisme de l’habitat intelligent et connecté. L’Alsace se focalise sur le service à la personne. L’approche de la Sarre est plus globale et son intervention se situe plus haut dans la chaîne de décision : elle combine les notions d’AAL (Ambiant Assisted Living), de domotique et de services, alors que la France est plus proche du terrain.
Comment percevez-vous le développement de la Silver Economie au cours des prochaines années ?
Le marché du Smart Home arrive à maturité. Les industriels sont prêts à y investir et l’apparition sur le marché de composantes électroniques à bas coût d’origine asiatique va accélérer le mouvement. Le concept de Smart Services est également en pleine progression. Le monde médical et les acteurs de l’e-santé ont besoin de relais pour se rapprocher des utilisateurs finaux. Nous l’avons constaté lors du salon CES2016 à Las Vegas. Hakisa figurait parmi les 15 start-up retenues par la Poste dans le cadre du programme FrenchLot, qui vise à soutenir les entreprises numériques françaises à l’international. Le premier visiteur que nous avons accueilli sur notre stand était l’US Postal !
En revanche, le Smart Care se heurte à certaines contraintes. Les personnes âgées ne sont pas toutes des geeks. Il faut aborder le secteur socio-médical avec précaution. Les pharmaciens y joueront certainement un rôle important. Notre hub social fera l’interface entre les séniors et l’e-santé. En matière de services à la personne, il faut créer un lien de confiance. La clé du marché repose à la fois sur les technologies et sur la crédibilité nécessaire pour y aller. La Silver Economie constitue un écosystème complexe où les grandes industries feront le marché, mais où les petites structures très spécifiques auront toute leur place.
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