Après une carrière passée chez Vinci, leader mondial de la construction, Dominique Massonneau a entrepris d’édifier un groupe à taille humaine. Constitué de 13 sociétés de chauffage réparties entre le Grand Est et l’Ile-de-France, M-Energies mise sur l’autonomie des structures et sur le lien social pour concurrencer les majors.
En créant M-Energies, vous avez voulu prendre le contrepied des grands groupes. Quelle est la traduction la plus manifeste de cette approche ?
Nous évitons la brutalité. J’ai constaté que le choc des cultures provoquait souvent beaucoup de dégâts. Lorsque nous reprenons une entreprise, nous conservons son dirigeant ou son second. Nous n’imposons pas systématiquement nos pratiques. Lorsqu’une idée nous paraît bonne, nous la conservons et nous la reprenons dans les autres structures. Cette approche vaut également pour les salariés. Nous ne les considérons pas comme des matricules. Il n’y a pas de pointeuse. Dans la mesure du possible, nous aménageons les horaires pour leur permettre de poursuivre leurs activités extraprofessionnelles. Le principe du dialogue fidélise les salariés et rassure également les clients, même parmi les grands comptes : ils savent à qui s’adresser et retrouvent toujours les mêmes interlocuteurs. Ce sont les relations humaines qui font notre force.
Vous avez défini seul l’intégralité de votre stratégie. Existe-t-il des contrepouvoirs au sein de la société ?
Je ne décide jamais tout seul. Les rôles sont bien définis au sein de la société : je suis clairement président, Patrick Steinmetz, clairement directeur général. Nous avons mis en place une organisation horizontale. Le comité de direction et le comité exécutif débattent de tous les projets importants. Le Codir regroupe une demi-douzaine de personnes dont la direction administrative et financière et les RH. Le Comex regroupe la vingtaine de responsables de centres de profits. Chacun a son rôle à jouer. Les idées viennent souvent des équipes. Mon rôle est de voir les choses en grand, de structurer les ambitions et de donner des moyens. Les discussions sont très libres. Nous ne sommes pas toujours d’accord, mais il n’y a jamais de passage en force. Qu’il s’agisse de rachat d’une société ou de la stratégie globale du groupe, les décisions sont validées à l’unanimité.
Vous êtes-vous appuyé sur d’autres exemples pour mettre votre modèle social ?
M-Energies adhère à la charte Entrepreneurs d’avenir, qui entend conjuguer la compétitivité avec le respect de l’individu, le bien-être au travail et les normes éthiques, sociales et environnementales. Ce réseau regroupe près de 800 entreprises souvent d’une taille supérieure à la nôtre. J’adhère à son aspect humaniste et j’apprécie sa dimension intellectuelle. Plus généralement, j’observe une dualité entre les entreprises qui privilégient le côté financier et celles qui jugent que l’aspect humain est au moins aussi important. Le deuxième modèle me paraît plus pérenne et crois beaucoup en la société civile pour faire progresser ces valeurs.
Estimez-vous vous être pleinement conformé aux objectifs que vous vous êtes fixés voici dix ans ?
Le périmètre initial s’est élargi avec l’extension en Ile-de-France, mais le modèle n’a pas changé. Nous sommes restés dans les métiers de la thermie. Cela rassure nos partenaires et facilite le management. Nos salariés ne sont pas des hommes à tout faire : ce sont des professionnels du gaz et de l’électricité, avec des compétences pointues dans des métiers très techniques. Nous avons également évité les diversifications hasardeuses. Dans le domaine des énergies renouvelables, il ne sert à rien d’être en avance et il est risqué d’avoir raison trop tôt. Les modèles économiques du photovoltaïque et de l’éolien ne sont pas encore stables et les secteurs subventionnés peuvent parfois s’effondrer. J’ai toujours recherché du stable, du fiable, du pérenne. Je suis fier d’avoir réussi sans casse.
Comment envisagez-vous l’avenir de votre groupe ?
Je n’ai pas de velléité dynastique. Je n’exclus pas un mariage avec une entreprise de même taille. Mais les valeurs humaines qui ont structuré M-Energies sont à mes yeux au moins aussi importante que l’aspect financier. Si le rapprochement avec une autre structure risquait de détruire ces valeurs, je ne le ferais pas.
Propos recueillis par Pascale Braun
Dominique Massonneau, président de M-Energies
En dates
1987 : Direction régionale de SGE (futur Vinci) dans l’Est de la France.
2003 : Entrée au capital de Solorec.
2007 : Départ en retraite.
2008 : Fondation de M-Energies.
En chiffres
40 millions d’euros : C’est le chiffre d’affaires prévisionnel de 2017.
350 : C’est l’effectif de M-Energies et de ses 22 centres de profit.
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