Le laboratoire d’enfouissement des déchets hautement radioactifs de Bure (Meuse) a connu le 26 janvier un deuxième accident mortel depuis le début du creusement en 2000. Selon l’Andra, un arrêt prolongé du chantier ne mettrait pas en cause le projet Cigéo. Mais l’accident pose la question de la sécurité des techniques de creusement.
Le parquet de Bar-le-Duc (Meuse) a ouvert une enquête pour déterminer les circonstances dans lesquelles un ouvrier âgé de 42 ans employé par Eiffage infrastructures a trouvé la mort dans un éboulement survenu au laboratoire de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) à Bure. Le chantier emploie actuellement 400 personnes, dont 160 agents de l’Andra et 240 salariés d’entreprises prestataires travaillant dans les mêmes conditions de sécurité. Directeur du site, Jean-Claude Baillet a indiqué au cours d’une conférence de presse que l’accident ne remettait pas en cause l’ensemble du programme. Le chantier de creusement est momentanément suspendu, les expérimentations se poursuivant via les installations pilotées depuis sa surface.
Un précédent en 2002
L’éboulement, qui s’est produit lors d’une opération de boulonnage, a causé le premier accident mortel depuis que l’Andra est passé de la phase de recherche fondamentale, qui a duré de 2000 à 2009, à des expérimentations portant sur la conception industrielle du projet d’enfouissement, à 500 mètres de profondeur, des déchets les plus hautement radioactifs de l’industrie nucléaire.
En mai 2002, un accident avait coûté la vie à un ouvrier du Groupement fonds Est alors que le forage atteignait 226 mètres de profondeur. Le sinistre avait entraîné l’arrêt du chantier durant un an, obligeant l’Andra à écourter le programme de recherche qui devait démontrer la faisabilité de l’enfouissement de déchets hautement radioactifs en couche argileuse. L’agence n’en avait pas moins conclu à la fiabilité et à la sûreté du confinement des fûts dans la couche d’argilite callovo-oxfordienne constituée voici 150 millions d’années.
Un coffre-fort qui se fracture
L’accident du 26 janvier pose la question des techniques de creusement, mais aussi celles de la sécurité du futur site de stockage Cigéo dont l’Andra compte demander l’autorisation de création en 2018.
Alors que l’Andra présentait le sous-sol de Bure comme un coffre-fort inébranlable, cet éboulement pose clairement la question de la stabilité réelle de l’argile souterraine dans laquelle pourrait être creusé Cigéo. Si des fractures souterraines, liées notamment aux opérations de creusement des galeries, apparaissent dans le laboratoire, qu’en sera-t-il si le centre de stockage souterrain est construit et connaît un tel accident alors qu’il est rempli de déchets radioactifs ?
Collectif Stop Bure, qui regroupe une dizaine d’associations opposées à l’enfouissement
L’accident survient de surcroît dans le contexte tendu du chiffrage de Cigéo, qui varie selon les estimations de 25 à 35 milliards d’euros. Les recherches actuelles menées à Bure alimentent l’avant-projet détaillé du projet qui devra être remis en 2017. Ce document doit étudier différentes options pour réduire le coût et la durée des travaux de soutènement, allonger les alvéoles confinant les déchets de haute activité et à vie longue (HAVL), voire élargir le stockage aux déchets de faible activité à vie longue (FAVL) pour améliorer la viabilité économique du projet. Force est de constater que ces travaux pratiques annoncés début janvier commencent mal.
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