La Haute-Marne profitera des recettes fiscales du stockage, dans la Meuse, de déchets radioactifs. Organisée par le comité local d’information et de suivi (Clis) le 24 septembre à Bure (Meuse), la réunion publique sur le projet d’enfouissement de déchets hautement radioactifs dans le sous-sol meusien a laissé aux participants le sentiment que certaines questions de fond sont enterrées un peu vite.
Confrontés à la perspective d’un site de stockage, dont la construction pourrait débuter en 2017, les conseils généraux de la Meuse et de la Haute-Marne tentent d’anticiper les projets de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) en se répartissant par avance les retombées fiscales d’un éventuel enfouissement.
Transport en pente douce
C’est sur le territoire meusien que l’agence nationale envisage le stockage, mais le conseil général de la Haute-Marne a obtenu la création d’une descenderie de 5 km débouchant sur son sol. En 2005, l’Andra avait privilégié l’option de deux puits verticaux pour enterrer les colis de combustible irradié. Elle juge aujourd’hui acceptable l’hypothèse d’un transport en pente douce qui, certes, présenterait davantage de risques de défaillance qu’un puits vertical, mais dont l’impact, en cas d’accident, serait potentiellement réduit.
Plus motivé par la diplomatie territoriale que par des nécessités techniques, le principe d’une descenderie haut-marnaise a permis de justifier la création d’une zone d’activités interdépartementale dont les revenus seront répartis entre la Meuse (60 %) et la Haute-Marne (40 %). Acté le 27 février, le compromis a fait l’objet d’âpres négociations. Seul département concerné par le stockage, la Meuse pouvait prétendre à l’intégralité des retombées fiscales. Craignant de subir les mêmes inconvénients que son voisin sans tirer de bénéfices, la Haute-Marne revendiquait un partage à 50-50 des éventuelles recettes liées au centre d’enfouissement.
Encore des zones d’ombre
Les deux conseils généraux ont ainsi admis qu’une limite départementale n’a guère de sens au regard d’une installation nucléaire.
Les accords ne résistent pas toujours au temps. La descenderie permet d’ancrer physiquement une partie du projet en Haute-Marne et d’équilibrer la répartition de l’activité entre stockage et installations de surface.
Bruno Sido, président (UMP) du conseil général de la Haute-Marne.
Les installations ne seront plus ni en Meuse ni en Haute-Marne, mais dans une zone commune. Pour autant, la descenderie ne constitue qu’une hypothèse de travail, la décision finale appartiendra au financeur. Sur le dossier de l’enfouissement, rien n’est acquis ni facile.
Christian Namy, président (Parti radical) du conseil général de la Meuse
Quinze ans après le lancement des premières prospections de l’agence nationale, les deux élus s’accordent à pointer l’insuffisance des mesures d’accompagnement économique sur leurs territoires.
« Le partage des retombées d’une installation nucléaire est prévu depuis la fin des années 70 »
(*) L’article 1648 A, modifié par l’article 42 de la loi du 28 décembre 2011, fixe le montant des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle alloués par l’Etat pour mieux répartir les produits fiscaux entre les communes riveraines d’un « établissement exceptionnel », comme une centrale nucléaire.Dès la fin des années 70, le Code général des impôts [*] a prévu le partage des retombées fiscales liées aux installations nucléaires implantées dans des territoires plus larges que la commune concernée, y compris à l’échelle interdépartementale. Mais ce cadre juridique, qui a beaucoup évolué, ne s’applique pas à un centre d’enfouissement souterrain. Si le projet de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs [Andra] aboutit, le centre industriel de stockage de déchets pour les déchets de haute activité [HA] et de moyenne activité à vie longue [MA-VL] en couche géologique profonde constituera une sorte d’ovni. Les élus ont bien raison de s’y prendre à l’avance pour optimiser la gestion des retombées..
L'expert - Claude Wallendorff, secrétaire général de l'Association des représentants des communes d'implantation de centrales nucléaires (Arcicen)
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