C’est une table d’hôte bien particulière que Christophe Dufossé a ouvert en décembre à Metz : les convives de la “salle à manger du chef” choisissent 48 heures à l’avance entre 25 produits de saison des denrées qu’ils sont assurés de retrouver au menu, mais sans savoir comment ils seront accommodés.
La surprise apparaît dans un salon privatif, dans les locaux du restaurant gastronomique «La Table » où, parmi les oeuvres de l’artiste Flickinger, un chef cuisine des plats devant quatre à douze hôtes.
La Table, c’est un restaurant qui me ressemble : une cuisine épurée et sans chichis, avec du goût et de la saveur.
Le chef Christophe Dufossé
A 50 ans, costaud, barbe soignée et chemise noire, l’homme, en impose par le calme et la clarté de son propos. Originaire de Calais, le « Chti », qui avait déjà obtenu une étoile au Michelin dans deux précédents établissements, en Champagne et en Bourgogne, en a aussi décroché une pour « La Table ».
Mais la marque « La Maison Dufossé » chapeaute également un hôtel de luxe, une brasserie, une activité traiteur… Car Christophe Dufossé, qui dit avoir appris la cuisine et la rigueur auprès de sa grand-mère alsacienne, est aussi un chef… d’entreprise. Avec 130 salariés pour 13 millions d’euros de chiffre d’affaires prévus en 2019.
A son arrivée à Metz, il reconnait avoir un peu manqué d’humilité. Depuis, Christophe Dufossé a travaillé la quiche lorraine – déstructurée jusqu’à en devenir méconnaissable, elle retrouve toute ses saveurs en bouche– et s’est fondu dans le paysage local. Et il le fait rayonner jusqu’en Chine où il entend même ouvrir, d’ici à septembre, une école culinaire.
Un vestige militaire vieux de 500 ans
Christophe Dufossé a découvert l’empire du Milieu à l’invitation du centre de formation du FC Metz, qui y recrute ses stagiaires. Dans cet immense pays, le cuisinier, doté d’un sens aigu des affaires, a vu grand. Il a choisi Chengdu, dans la province du Sìchuān pour ouvrir, dès 2012, le restaurant français « Jin Yue by Christophe Dufossé ». Dans cette Riviera chinoise réputée pour sa cuisine, l’établissement, parrainé par Jean-Pierre Raffarin, a accueilli en grande pompe le 50 ème anniversaire de l’amitié franco-chinoise en 2014 et compte le couple Obama parmi ses hôtes de marque.
De son succès chinois, Christophe Dufossé tire plus d’émotion que de gloriole.
La Chine a été un coup de cœur et fait désormais partie de mon équilibre d’homme. Mon groupe n’a pas vocation à essaimer ailleurs.
Christophe Dufossé
Le chef messin s’est ancré en Lorraine aprèsavoir racheté à Metz avec son épouse Delphine, la Citadelle, il y a 15 ans.
Ce vestige militaire, vieux de 500 ans et transformé par le couple en hôtel quatre étoiles, a accueilli François Hollande et Angela Merkel lors du sommet franco-allemand en 2015. Et ses 79 chambres et deux suites continuent d’héberger le gotha français et étranger de passage à Metz.
Un nouveau « laboratoire »
Le couple prévoit, en plus de la boutique gastronomique et d’une brasserie, logées dans l’enceinte du bâtiment historique, un investissement global de dix millions d’euros au cours des deux prochaines années. Avec, entre autres, l’ouverture en avril d’un laboratoire à Marly, dans la banlieue cossue de Metz. Courant sur 3.000 mètres carrés, ce lieu offrira, outre ses réserves, une boulangerie-pâtisserie, une épicerie fine proposant 1.200 références et une école de cuisine – un concept étrenné dans les cuisines de Metz. Déjà, l’activité traiteur s’est développée dans moult réceptions du Grand Est, à commencer par le nouveau centre des congrès Robert Schuman dès son ouverture en septembre.
Le cuisinier ne cite aucun mentor, mais salue le rôle essentiel de son épouse, qui l’accompagne dans ses prises de risque tout en tempérant un caractère quelque peu éruptif. Le couple a laissé ses deux fils libres de leur parcours professionnel, l’un dans la cuisine, l’autre dans la musique. Epris d’art culinaire, mais aussi de voyages, de musique et de cinéma, Christophe Dufossé aspire à présent à retranscrire dans un livre tout ce qui a su le faire rêver.
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