Elue du Parti populaire européen (Démocrates-Chrétiens) à Bruxelles, la députée alsacienne Les Républicains Anne Sander siège à la Commission de l’emploi et des affaires sociales du Parlement européen. Favorable à un renforcement des dispositifs de contrôles des travailleurs détachés, elle plaide néanmoins pour un droit à l’expérimentation pour fluidifier les échanges dans les régions frontalières.
Avez-vous été saisie des difficultés qu’engendre depuis un an une interprétation jugée plus restrictive des directives européennes sur le détachement transnational de travailleurs dans l’espace transfrontalier ?
J’ai effectivement été alertée par des collègues allemands qui s’inquiètent de formalités de plus en contraignantes pour accéder au marché français. Mais j’entends aussi de nombreux chefs d’entreprise français qui se plaignent des difficultés qu’ils rencontrent pour travailler Outre-Rhin. Un groupe de femmes cheffes d’entreprises du BTP m’ont ainsi indiqué qu’elles avaient reçu la visite de l’inspection du travail allemande dès le premier jour du chantier. Les obligations et les contrôles fonctionnent dans les deux sens.
Comment les débats sur le travail détaché évoluent-ils à Bruxelles ?
La Commission travaille actuellement sur une révision des règles sur le détachement, car les problèmes de fraude et de dumping social subsistent. Les propositions du rapport Morin-Chartier visent notamment à imposer aux employeurs de travailleurs détachés un salaire minimum qui tiendrait compte de l’ensemble de la rémunération pratiquée en France, primes, treizième mois et hébergement compris. Certains députés, dont je fais partie, veulent appliquer le droit du pays d’accueil dès le premier jour du détachement.
Ces dispositions ne sont-elles pas préjudiciables à la fluidité du marché en zones frontalières ?
Je ne le pense pas : les règles sur le détachement de travailleurs doivent être appliquées de la même manière dans tous les pays, même si elles sont plus difficiles à mettre en œuvre dans les zones frontalières. En revanche, il faut faire preuve de souplesse et d’intelligence dans le cadre du travail transfrontalier. Nous sommes tous conscients que le taux de chômage est élevé côté français tandis que l’Allemagne manque de main d’œuvre. Il faut trouver des outils qui permettent de concilier concurrence et partenariat. Suite à une proposition formulée par le Luxembourg lors de sa présidence de l’Union européenne en 2015, la Mission opérationnelle transfrontalière élabore un outil qui permettrait aux autorités locales de mettre en œuvre un cadre juridique adapté à la coopération transfrontalière. Je suis tout à fait favorable à ce type d’expérimentation. Si les représentants du monde de l’entreprise parviennent à se mettre d’accord sur des propositions dans ce cadre, nous les soutiendrons.
Propos recueillis par Pascale Braun
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