L’émergence, au début des années 2000, de l’un des plus grands projets urbains d’Europe sur les friches sidérurgiques d’Esch-sur-Alzette, a infléchi le déclin de la bordure lorraine du Sud luxembourgeois. Etape par étape, le territoire s’approprie la chance d’intégrer l’agglomération transfrontalière Alzette-Belval, qui passera de 90 000 à 130 000 habitants au cours des 15 prochaines années.
Il aura fallu de la chance et des concours de circonstances, mais aussi l’implication sincère d’enfants du pays ou d’alliés de passage pour faire basculer les huit communes du Pays-Haut-Val d’Alzette de la perspective de la déshérence à celle de la prospérité. La frange frontalière du nord lorrain doit beaucoup à l’Etat luxembourgeois qui a choisi, au début des années 2000, d’implanter à Esch-sur-Alzette un nouveau pôle tertiaire et universitaire d’envergure européenne. Mais les petites communes frontalières de l’ancien bassin sidérurgique lorrain n’auraient pas eu les moyens de saisir cette opportunité sans l’élan décisif impulsé par Nicolas Sarkozy le 9 octobre 2009. Soucieux d’atténuer l’impact des plans sociaux d’ArcelorMittal à Gandrange, puis à Florange, le chef de l’Etat a annoncé la transformation en Opération d’intérêt national du projet d’Ecocité Alzette-Belval.
Nous avons la chance d’être limitrophes du projet de Belval et d’avoir obtenu une opération d’intérêt national. Mais cette OIN n’aurait été qu’une coquille vide sans l’implication des collectivités locales. Sa dimension transfrontalière repose sur une culture qui fut longtemps identique côté lorrain et luxembourgeois et sur la coopération établie de longue date entre les communes de part et d’autre de la frontière.
André Parthenay, président de la Communauté de communes Pays-Haut Val d’Alzette
Des routes et des impasses
En 2010, Pascal Gauthier, alors directeur de l’Etablissement public foncier de Lorraine et préfigurateur de l’OIN, a élaboré une feuille de route à la fois ambitieuse et circonspecte. Dans ses grandes lignes, le document reste valable tant par le potentiel qu’il décline que par les écueils qu’il pointe. L’écocité a bel et bien constitué le fil rouge du projet et les projets tertiaires et technologiques portés par l’Etablissement public d’aménagement, maître d’œuvre de l’OIN, écartent le risque de réduire le territoire à une simple cité dortoir. Les dissensions internes à la Lorraine et les désaccords avec le Grand-Duché ont été évités.
En revanche, l’hôpital transfrontalier espéré n’a jamais vu le jour et les datacenters qui devaient s’y accoler pour mutualiser l’énergie sont restés dans l’attente d’autres débouchés. L’essor des biotechnologies s’est concrétisé à Belval, côté luxembourgeois, et les possibilités de formation professionnelle transfrontalière ne se sont que partiellement concrétisées. Un accord bilatéral autorise depuis mai 2015 les apprentis français de niveau CAP à effectuer un stage au Luxembourg, mais cette possibilité n’est pas encore ouverte aux étudiants en BTS.
Les opportunités du juxtafrontalier
Mentionné dès 2010 à titre d’hypothèse, le Groupement européen de coopération transfrontalière (GECT) Alzette-Belval s’est constitué en 2013 pour harmoniser le développement d’une agglomération regroupant d’un seul tenant les huit communes de la CCPHVA et les localités luxembourgeoises de Sanem, Esch-sur-Alzette, Schifflange et Mondercange.
Le CECT suscitait beaucoup d’attentes. Pour la période 2014/2016, notre premier programme nous a permis de définir deux grands axes – le positionnement d’Alzette-Belval comme agglomération transfrontalière à part entière et le vivre-ensemble au sein de cette agglomération – et de retenir certaines thématiques dont la mobilité, la santé et la formation professionnelle, que nous approfondirons au cours de notre prochaine programmation.
Dorothée Habay-Lê, directrice du GECT Alzette-Belval
Interface entre les Etats et les collectivités de part et d’autre de la frontière, le GECT s’implique non seulement dans les coopérations administratives, mais aussi dans les échanges entre citoyens dès le plus jeune âge. Le petit territoire revendique son aspiration à l’expérimentation pour mettre en relief les opportunités du juxtafrontalier.
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