Fin 2007, les trois quarts des salariés de l’usine de pneus Continental de Sarreguemines ont accepté par référendum de revenir aux 40 heures. Cinq ans plus tard, investissements et recrutements sont tangibles, mais pas nécessairement imputables à l’abandon des 35 heures.
Merci aux 40 heures? De prime abord, le choix des salariés de Continental Sarreguemines, qui ont voté à 75% pour le retour aux 40 heures de travail hebdomadaires fin 2007, paraît pleinement justifié. Au cours des cinq années écoulées, la maison-mère allemande du site mosellan a investi 120 millions d’euros dans l’acquisition de nouvelles machines, passé ses effectifs de 1100 à 1400 CDI et porté sa production de pneus annuelle de 8 à 12 millions d’unités. Mais ces chiffres traduisent une histoire passablement mouvementée.
En 2007, Continental n’avait pas lésiné sur la communication pour faire accepter l’idée du référendum qui allait déboucher sur un quasi plébiscite du retour aux 40 heures. Dans un DVD de 40 minutes adressé à chaque salarié, la direction rappelait les 77 millions d’euros investis de fraîche date sur le site mosellan et conditionnait implicitement les futurs investissements à une augmentation du temps de travail et de la productivité. Représentatives de 80% des salariés, les organisations syndicales CFTC, CFDT, CGT et FO ont ratifié le 21 décembre un accord prévoyant à la fois le retour aux 40 heures, des compensations salariales et l’ouverture de négociations sur la pénibilité.
Pérennisation du site
Un an plus tard, la crise rattrapait Continental, conduisant le groupe à revenir aux 35 heures sur son site mosellan et à fermer à grand fracas son usine de Clairoix (Oise). L’usine de Sarreguemines a clairement bénéficié de cette nouvelle donne, qui lui conférait des volumes supplémentaires. En 2010, un nouvel accord intitulé Cap 2014 a cré une variante des 40 heures en fixant la durée du travail à 35 heures hebdomadaires augmentée de 121 heures supplémentaires annuelles. Ce compromis a certainement joué un rôle dans l’investissement de plus de 100 millions d’euros consenti un an plus tard pour augmenter la production, censée passer à 37.000 pneus par jour. L’objectif n’est pas encore atteint, les salariés peinant à intégrer les nouvelles technologies et à s’adapter à des rythmes de travail générateurs de stress et de souffrance. L’usine compte aujourd’hui 600 salariés présentant moins de deux ans d’ancienneté -chiffre qui traduit à la fois une politique de recrutement volontariste et un fort turn-orver.
Le renoncement aux 35 heures a certainement joué un rôle dans la pérennisation du site, dans la création d’emplois et dans l’extension de l’usine. Mais elle s’est également traduite par une dégradation des conditions de travail et nul ne peut dire avec certitude que le passage aux 40 heures a sauvé l’usine, analyse Pierre Rubeck, délégué central CFTC du comité d’entreprise et du CHSCT. Dans un est-mosellan traumatisé par la fermeture des mines, les salariés ont gagné quelques garanties sur la pérennité de l’usine, du moins à moyen terme.
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