Dans la seconde moitié du XXème siècle, trois nouveaux quartiers se sont imbriqués de part et d’autre de Woippy. Centré sur les secteurs de Saint-Eloy, de Boileau-Pré Génie et du Roi, le programme de renouvellement urbain a recréé du liant et rétabli la cohésion dans cette commune du nord de Metz.
Dans la banlieue nord de Metz, Woippy s’est forgé au cours du XXème siècle une identité forte et changeante. Réputée pour ses fraises – à tel point que l’occupant allemand y fit construire en 1908 une gare dédiée à l’export de la production en Prusse -, la commune a perdu son caractère bucolique au cours de la Deuxième guerre mondiale. Les fraises ont cédé la place aux pommes de terre. Bien pire, les bombardements et combats y ont fait rage, à tel point que la commune, citée à l’ordre de la Nation, a obtenu la Croix de guerre 1939-1945.
Manque de liant
Plus sereines, les Trente Glorieuses n’en ont pas moins marqué profondément l’urbanisme de l’ancien village agricole. Dans les années 50 et 60, le nouveau quartier Saint-Eloi a permis de reloger des centaines de Messins dans 300 petits pavillons à Woippy suite aux démolitions massives opérées dans le quartier du Pontiffroy. L’essor de la gare de triage a engendré le quartier du Roi, qui loge les cheminots dans les plus hauts immeubles de la ville. Dans les années 70, les grands ensembles des quartiers Boileau-Pré Génie ont absorbé l’augmentation globale de la population dans la périphérie de Metz.
Cette juxtaposition de quartiers manquait cruellement de liant. Depuis les années 80, plusieurs décennies de politique de la ville se sont efforcées de gommer une image devenue très négative et de reconstruire la cohérence perdue. Lancé en 2004, un programme de rénovation urbaine a mobilisé 120 millions d’euros, dont 44 millions d’euros apportés par l’Anru, 34 millions d’euros par les bailleurs, 18 millions d’euros par la Ville et 5 millions d’euros par Metz Métropole.
La particularité de ce plan consiste en la répartition à parts quasi égales entre les opérations liées au logement et aux aménagements. Il a fallu un long travail de connexion pour recréer la ville dans sa totalité.
Cécile Vinot, directrice du service solidarité-emploi et politique de la ville à Woippy
Signé en janvier 2020, un nouvel engagement de l’Anru entend pérenniser ces acquis avec un programme de 3 millions d’euros qui permettra d’engager une démarche d’écoquartier en entrée d’agglomération.
Désenclavement en interne
En matière de mobilité, les quartiers de Woippy partaient de loin : à Pré-Trompette, une composante de Saint-Eloi, les habitants devaient parcourir un kilomètre à pied avant de trouver le premier arrêt de bus ! Les transports publics avaient d’ailleurs le plus grand mal à se croiser dans les rues étroites, sans compter les sens uniques et les culs de sac. Une vaste opération de désenclavement interne a permis de reconnecter les quartiers à l’avenue de Thionville, qui constitue l’axe principal de Woippy, mais aussi de désenclaver les routes secondaires et de rouvrir des impasses. Le Mettis, qui n’était encore qu’un projet lors du lancement de l’opération Anru, a relancé la mobilité du quartier tout entier : le bus à haut niveau de service, complété par un parking-relais, place désormais Saint-Eloi à 20 minutes du centre-ville de Metz.
La ferme et la plage
Mieux, la mobilité fonctionne dans les deux sens. En parallèle du désenclavement, Woippy s’est enrichi d’équipements publics dont une ferme pédagogique et une baignade publique, Woippy plage, qui attire depuis une dizaine d’années des jeunes de toute l’agglomération. Les groupes scolaires ont été restaurés et une école de la deuxième chance a ouvert rue du Chapitre. Le centre culturel l’Atrium dans le quartier du Roi et la rénovation des complexes sportifs ont contribué à l’attractivité de la ville.
En matière de logement, les derniers immeubles construits ont été les premiers démolis, tant ils avaient mal vieilli. A la croisée des quartiers Pré-Génie et Saint-Eloi, cinq tours, soit 174 logements, ont été supprimées pour laisser place au pôle Charcot, composé de petits collectifs proposant commerces et services en rez-de-chaussée. D’autres démolitions ciblées ont permis de supprimer des îlots d’insalubrité au droit de la rue Pierre-et-Marie-Curie. Dans le quartier Saint-Eloi, les quelque 300 pavillons avec jardins avaient également besoin d’une réhabilitation. Son principal bailleur, MHT, y a engagé un programme d’accession à la propriété qui lui a permis de vendre la moitié de son patrimoine. Le nouveau programme de renouvellement urbain prévoit la réhabilitation de des pavillons restants.
En 15 ans, le programme de l’Anru a permis 224 démolitions et autant de reconstructions, 637 réhabilitations et 1.300 résidentialisation – en l’occurrence, une meilleure définition des espaces publics, semi-publics et privés. Les habitants ont été consultés sur l’aménagement des cours d’immeubles et des places publiques. L’instauration de points de collecte enterrés et la généralisation de la vidéosurveillance ont contribué à la propreté et à la sécurité du quartier.
Woippy n’en demeure pas moins une ville jeune et pauvre, avec 40 % d’habitants âgés de moins de 30 ans, un taux de chômage dépassant 40 % chez les jeunes de moins de 24 ans et un revenu médian de 16 134 euros en 2016, soit un quart de moins que la moyenne nationale (chiffres Insée, janvier 2020). La suite du programme de renouvellement urbain tiendra compte de ce constat. Un bâtiment à vocation multiple regroupera les magasins solidaires et les lieux d’accueil rue de l’Abbé Pierre. Sur les friches industrielles bordant l’avenue de Thionville, une démarche écoquartier doit reconnecter la ville à son passé agricole en proposant des jardins maraîchers partagé. Une halle de restauration proposera des produits frais cuisinés sur place pour conjuguer emploi et convivialité.
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