Une zone franche dans le Nord lorrain ? Le débat divise la classe politique locale. En mars dernier, Christian Eckert, ex-député de Longwy, alors secrétaire d’Etat au Budget, s’était engouffré dans la brèche ouverte par Bernard Cazeneuve dans les Hauts-de-France pour solliciter la création d’une zone à fiscalité favorable à la frontière franco-luxembourgeoise. Objectif : attirer de nouvelles entreprises pour ne pas « rester des cités-dortoirs », dixit ses promoteurs.
Sénateur socialiste de Meurthe-et-Moselle depuis septembre dernier, Olivier Jacquin a repris cette proposition sous la forme d’un amendement, rejeté le 15 décembre dernier. Dans l’intervalle, Xavier Paluszkiewicz, nouveau député LRM de Longwy, a déposé un amendement qui a été, lui aussi, été retoqué, mais qu’il compte retravailler pour l’inscrire dans le projet de loi de finances 2019. Les deux propositions divergent sur le périmètre potentiellement concerné et sur des questions de calendrier.
Ma proposition s’inscrit dans le cadre d’un plan global sur le Nord lorrain. Nous allons perdre un an, alors que nous disposons d’un texte immédiatement applicable.
Olivier Jacquin
Réforme du Code minier
Je ne suis pas là pour porter les projets de mon prédécesseur. La proposition de Christian Eckert exonérerait une dizaine d’EPCI, sans que l’on sache qui supporterait le manque à gagner, et présenterait un risque d’inconstitutionnalité.
Xavier Paluszkiewicz
Le nouveau député milite pour un dispositif plus modeste, en lien avec la réforme du Code minier. Dans ce cadre, une trentaine de communes répondant pourraient bénéficier des dispositifs de zone franche. Gérald Darmanin, ministre de l’Action et des Comptes publics, et Jacques Mézard, ministre de la Cohésion des territoires, ont annoncé une visite à Longwy fin janvier.
90.000 frontaliers
Franco-français, la pertinence du dispositif fait débat. L’ancien bassin sidérurgique et ferrifère a mis plus de 30 ans à surmonter la crise des années 1980 et n’a rejoint la moyenne nationale du taux de chômage que grâce à l’essor du travail frontalier , qui concerne aujourd’hui plus de 90.000 personnes. Dans le Pays-Haut, qui englobe une soixantaine de communes à la frontière belgo-luxembourgeoise, plus de la moitié des actifs travaillent au Luxembourg. Confrontées au salaire minimum grand-ducal, qui s’élève à 2.000 euros, les entreprises locales peinent à recruter. Les dispositifs fiscaux luxembourgeois demeurent par ailleurs des plus attractifs.
Je n’imagine pas une entreprise belge ou luxembourgeoise s’implanter sur une zone franche française. Il me semble préférable de miser sur la formation pour apporter des compétences à un même bassin d’emploi transfrontalier.
Edouard Jacque, délégué aux Travailleurs frontaliers au conseil régional du Grand Est
De l’avis général, une zone franche ne résoudrait pas le déséquilibre croissant entre un Grand-Duché florissant et un Nord lorrain appauvri par le manque de recettes fiscales. Sous-jacente, mais lancinante, la question des cofinancements ou compensations que pourrait accorder le Luxembourg ressurgira sans doute à l’occasion de la visite ministérielle annoncée.
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