Nicolas Sarkozy annonce des propositions imminentes pour sauver le site d’ArcelorMittal de Florange tandis que François Hollande dépose un projet de loi visant à sécuriser une éventuelle reprise du site de 3.000 salariés. Mais ArcelorMittal fait peu de cas des gesticulations des candidats à l’élection présidentielle française.
“Redémarrage ou enfumage”
La formule des syndicalistes d’ArcelorMittal, dont les 3.000 salariés se trouvent aujourd’hui au chômage partiel ou total, résume en termes crus l’enjeu du débat qui focalise aujourd’hui les candidats à la présidentielle. En promettant lundi dernier des propositions précises sur Florange et en affirmant que l’Etat soutiendrait à hauteur de 150 millions d’euros le projet européen Ulcos, qui prévoit l’implantation de captage-stockage de CO2 sur le site, Nicolas Sarkozy a suscité une impatience mêlée d’ironie, le soutien de l’Etat français à Ulcos étant acté depuis plusieurs mois.
La discussion franche et directe que le président compte engager avec la direction de Mittal laisse les syndicalistes d’autant plus sceptiques que le fameux voyage de noces à Gandrange le 4 février 2008 est resté dans les mémoires. La plaque de marbre Ici reposent les promesses de Nicolas Sarkozy a beau avoir mystérieusement disparu en janvier dernier, la suppression de 595 postes de l’aciérie mosellane d’ArcelorMittal demeure le symbole de l’impuissance des pouvoirs publics français face aux stratégies industrielles mondiales.
Indifférence d’ArcelorMittal au calendrier de la vie politique française
« A Gandrange, les engagements pris ont été tenus et au-delà », a martelé Eric Besson, venu déminer le terrain lors d’une visite en Moselle le 12 janvier dernier. Le ministre de l’Industrie tentait de présenter comme une victoire politique le reclassement de l’intégralité des 575 salariés licenciés de Gandrange et la mise en place d’une convention de revitalisation. Ces deux dispositifs relèvent pourtant des simples obligations légales d’ArcelorMittal. Seule l’implantation d’un centre de formation aux métiers de l’acier et la contribution d’ArcelorMittal du Fonds lorrain des matériaux à hauteur de 10 millions d’euros, peuvent réellement être mis au crédit de la mobilisation gouvernementale et territoriale.
En annonçant le non-redémarrage des installations de Florange le 14 février dernier, à la veille de la candidature de Nicolas Sarkozy à sa propre succession, ArcelorMittal a marqué une souveraine indifférence vis-à-vis des échéances électorales française. Invoquant la faiblesse conjoncturelle du marché européen de l’acier, le sidérurgiste s’est borné à laisser entrevoir la possibilité d’un redémarrage en début d’année prochaine.
Le projet Ulcos déterminant
Son PDG Lakshmi Mittal, auquel nul ne saurait reprocher de mensonge flagrant depuis son implantation sur le territoire français en 2006, n’exclut sans doute pas l’hypothèse d’une relance à Florange, où il a bel et bien engagé un plan de maintien des compétences sidérurgiques. Le site de Florange, réputé pour la qualité des aciers qu’il fournit notamment aux grands noms de l’industrie automobile allemande, ne paraît pas intrinsèquement condamné. Prévu en octobre prochain, l’arbitrage européen sur le projet Ulcos jouera un rôle déterminant. Une validation du projet européen obligeait l’industriel à injecter 200 millions d’euros au moins dans un outil industriel aujourd’hui délabré.
La campagne électorale exacerbe aujourd’hui l’espoir de rallumer au plus vite la flamme du haut fourneau P6 mais aucune mobilisation n’est parvenue à infléchir les choix stratégiques d’ArcelorMittal en Europe. A Liège, la forte implication de l’Etat belge n’a pu empêcher la fermeture du haut-fourneau de Liège, annoncée fin janvier après des mois d’expectative.
Le Luxembourg, où ArcelorMittal a pourtant basé son siège social européen en 2006, craint à court terme pour ses implantations à Schifflange et à Rodange. Florange redoute aujourd’hui un scénario à l’espagnole. Le sidérurgiste a annoncé fin janvier la mise en sommeil de son haut-fourneau madrilène pour une durée de. six ans. Dans une telle hypothèse, la proposition de loi de François Hollande permettrait une expropriation retentissante mais délicate à mettre en oeuvre.
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