EdF, Areva et le CEA sont tenus d’accompagner le développement économique des bassins d’emplois situés dans le périmètre du laboratoire d’enfouissement des déchets radioactifs de Bure, dans la Meuse. L’essor reste timide.
Deux centres d’archivage, un pilote semi-industriel d’agrocarburants, une unité logistique de pièces pour centrales nu-cléaires… Il y a neuf ans, l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) décidait d’implanter dans le village meusien de Bure un laboratoire d’enfouissement souterrain de déchets nucléaires de haute activité à vie longue. Areva, EdF et le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) engagent, aujourd’hui, à grand renfort de communication, les premières actions de leur programme d’accompagnement économique dans la Meuse et en Haute-Marne. Mais ce volontarisme ne suffit pas à transformer la réalité de territoires pauvres, qui peinent à profiter de la manne nucléaire, pour réaliser des projets structurants…
De 2000 à 2005, les 10 millions d’euros par département et par an gérés par les deux groupements d’intérêt public « Objectif Meuse » et « Haute-Marne » ont permis d’améliorer des réseaux routiers indigents et de financer une multitude de restaurations de monuments et la construction de salles polyvalentes. La loi programme du 28 juin 2006 a porté cette manne à 20 millions d’euros par département et par an et impose aux deux GIP de mener des actions d’aménagement du territoire et de développement économique. Les présidents des conseils généraux de la Meuse et de la Haute-Marne, Christian Namy et Bruno Sido, espèrent bénéficier dès l’an prochain du seuil maximal d’accompagnement, soit 30 millions d’euros par département et par an.
Un manque de compétences
Sous la pression permanente des élus, Areva, le CEA et EdF commencent à mettre en place des projets lourds et innovants. Ils s’attachent à faciliter l’accès des acteurs locaux à leurs achats et à faire progresser la qualité des entreprises, notamment en développant des formations. Ce démarrage, financé par les seuls opérateurs et non pas par l’Etat, a été tardif. Il faut aller plus loin.
Christian Namy, le président (divers droite) du conseil général de la Meuse
Areva et EdF auraient passé, l’an dernier, pour plus de 10 millions d’euros de commandes auprès d’entreprises locales. Cependant, rares sont celles qui ont les compétences et les certifications requises pour postuler aux appels d’offres des deux donneurs d’ordres.
Une unité logistique de pièces « légères » et « froides » pour les centrales nucléaires d’EdF, en France et en Grande-Bretagne, doit ouvrir en 2012 à Velaines (lire la carte ci-dessus). Elle constituera le premier projet à caractère industriel de l’électricien dans la Meuse.
Outre les 65 emplois générés, cette plate-forme nous permettra peut-être de confier à des entreprises locales de métallurgie et de mécanique la réparation des pièces de rechange. Nous souhaitons développer des partenariats avec les industriels pour leur permettre de devenir des fournisseurs de premier, et non plus de troisième ou de quatrième rang.
Bruno Fredet, le responsable de l'accompagnement économique Meuse/Haute-Marne pour EDF
Implanté à Bar-le-Duc en février dernier à l’initiative du bureau d’études nancéien B2J, sous-traitant d’EdF, le holding Aloris, qui regroupe quatre sociétés lorraines, doit aider les entreprises de métallurgie, de mécanique, d’électricité et de câblage à décrocher des commandes, ce qui requiert des compétences multiples. La structure, qui ne compte pour l’heure qu’un salarié en Meuse, annonce hardiment un objectif de 30 créations d’emplois au cours des trois prochaines années. Initiée en janvier dernier par Luc Chatel, maire (UMP) de Chaumont et alors secrétaire d’Etat en charge de l’Industrie et de la Consommation, cette action collective n’a pour l’heure permis de ne faire aboutir aucun dossier.
500 créations d’emploi à la clé
Encore faibles, les marchés liés à l’énergie ne peuvent que progresser. Ils décolleront sans doute d’ici à un ou deux ans.
Luc Maurin, le gérant des Fonderies et ateliers Salin basées à Dammarie-sur-Saulx (Meuse) et président de l'association Energic 52/55 Sous-Traitance
Industriels et élus locaux se situent d’ores et déjà dans une nouvelle perspective. D’ici à la fin de l’année, l’Andra présentera au gouvernement quatre « zones d’intérêt pour une reconnaissance approfondie » afin de déterminer l’éventuel lieu de stockage des déchets radioactifs, dans un rayon de 30 kilomètres autour du laboratoire de Bure. L’opportunité d’un tel stockage, qui engendrerait 500 créations d’emploi, sera tranchée d’ici à 2015. Les installations souterraines se situeraient dans la couche argileuse, côté meusien, et les descenderies reliant les galeries d’enfouissement aux installations de surface déboucheraient sur la zone de Bure-Saudron. La « poubelle atomique », dont les opposants à l’Andra dénoncent depuis dix ans l’inexorable implantation, se dessine bel et bien.
Les riverains commencent à se représenter les chantiers de construction d’un centre de stockage, la mise en exploitation, les va-et-vient des convois, la sécurisation des transports et des installations en surface. Le revers que vient de subir l’Andra dans l’Aube indique que la contestation s’élargit.
Benoît Jaquet, le directeur du comité local d'information et de suivi du laboratoire de Bure
Courant août, les maires des deux communes d’Auxon et de Pars-les-Chavanges, situées dans l’Aube, qui postulaient à l’implantation d’un stockage souterrain de déchets radioactifs de faible activité à vie longue, ont retiré leur projet face au tollé de leurs administrés.
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