Ancien fonctionnaire territorial, François Grosdidier a obtenu son premier mandat local 1989 en devenant conseiller municipal de Metz à l’âge de 28 ans.
Successivement vice-président du conseil régional de Lorraine (de 1992 à 2004), député de la Moselle (de 1993 à 1997, puis de 2002 à 2011), maire de Woippy (de 2001 à 2017), conseiller général (en 2011), puis élu sénateur de la Moselle en 2011, il est depuis cet été maire de Metz et président de Metz Métropole.
Le nouvel édile livre à Correspondances son approche de la coopération transfrontalière.
Vous situez-vous dans la continuité de votre prédécesseur Dominique Gros dans vos relations avec le Luxembourg ?
Je me situe en rupture, car je ne considère pas que le Luxembourg nous porte un préjudice qui demanderait réparation. Je ne suis pas dans ce type de rapports, alors même que le Luxembourg assure des revenus à 100.000 Mosellans dont 5.000 Messins et 7.000 métropolitains. Sans ces emplois, nous serions moins prospères ou en plus grande difficulté.
Je souhaite que d’avantage de Messins travaillent au Luxembourg. Nous conservons un taux de chômage de 10 %, alors que nous disposons de deux marchés de l’emploi. Nous devrions donc avoir l’un des taux de chômage les plus bas du pays. Ma préoccupation est que les travailleurs frontaliers puissent continuer à travailler au Luxembourg tout en vivant à Metz et dans la métropole, ce qui suppose des modes de transport et de locomotion plus fluides.
N’y a t-il donc pas donc pas de tension sur le plan du personnel qualifié ou de la fiscalité ?
La question de la formation est une mauvaise querelle. On ne nous vole pas du personnel formé, puisque la formation est attachée au salarié et non pas à l’entreprise. Il n’y a donc pas de préjudice en termes d’emploi. Il aurait un préjudice si les personnes quittaient notre bassin de population pour aller travailler ailleurs. Ce n’est pas le cas. Il faut mobiliser l’Etat ou la région pour former à hauteur des besoins, même si les bénéficiaires vont travailler au Luxembourg.
Les questions fiscales doivent être discutées entre Etats. Les collectivités tirent leurs revenus d’impôts locaux et de dotations qui sont calculées selon le nombre d’habitants et non pas en fonction de leur lieu de travail. Les collectivités doivent chercher des sujets de coopération gagnant-gagnant. Demander au Luxembourg de cofinancer des actions de transport ou de formation si elles correspondent à des besoins économiques, relève d’une toute autre démarche que celle d’un mauvais procès : c’est agir dans l’intérêt commun.
Au cours des dernières années, Metz et la Métropole ont revendiqué fortement leur dimension franco-allemande. Comptez-vous garder ce cap ?
Oui. Nous avons deux écoles biculturelles. Je souhaite qu’il y en ait d’avantage ou qu’à défaut, les écoliers puissent bénéficier d’un enseignement en allemand dans le cadre scolaire ou périscolaire. Je suis en phase avec le Département sur l’enseignement de l’allemand au collège. En matière d’universités et de grandes écoles, il faut aller plus loin dans les doubles diplômes et les partenariats franco-allemands tels qu’il en existe à l’Isfates, à l’Enim ou à l’Ensam. Le franco-allemand doit être la marque de l’enseignement supérieur à Metz.
Les partenariats économiques doivent également aller plus loin, qu’il s’agisse de coopérations entre start-up ou de pôles de compétitivité dans le domaine des métaux et des matériaux. Par exemple, je ne suis pas certain que l’on ait exploré tout le potentiel de coopération qu’offre l’institut Lafayette.
Sur quels réseaux comptez-vous vous appuyer pour développer la coopération transfrontalière ?
Nous faisons partie de deux réseaux, Quattropole et le Pôle métropolitain européen du Sillon lorrain, qui ne sont pas contradictoires. Une réunion du directoire de Quattropole a eu lieu cette semaine. Les quatre maires (*) sont bien décidés à développer la dynamique de ce réseau qui ne doit pas se cantonner à des aspects culturels ou musicaux, même si ces derniers ont leur importance.
Quatropole doit explorer tous les axes de la coopération communale et devenir une force de proposition et de revendication, y compris en matière de fluidité des transports et d’économie. Les coopérations sanitaires engagées lors de la crise méritent d’être approfondies. Metz et sa métropole doivent jouer un rôle dans l’animation des territoires et dans la redynamisation de la Grande Région. La coopération a fait ses preuves en matière de promotion touristique. La présence de nos voisins est un atout.
Au cours des dernières années, nous avons trop enfermé notre réflexion sur le Sillon et pas assez sur Quattropole, notamment en matière de transports. Au long du sillon lorrain, les problèmes de transport se posent plus au nord qu’au sud. On ne peut pas leur apporter une même solution, comme celle d’un RER métropolitain. Les questions ne se posent ni à la même échelle, ni de la même façon.
C’est pourquoi nous devons travailler sur les deux composantes et reprendre certains dossiers dans le cadre de Quattropole sans négliger ceux du Sillon.
Propos recueillis par Pascale Braun
(*) Quattropole réunit Metz, Luxembourg, Trèves et Sarrebruck.
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