La technologie développée par la start-up nancéienne guide les parfumeurs et les professionnels du packaging en traduisant couleurs, odeurs et émotions.
L’amour est rouge vif, avec quelques touches de rose. Et la sensualité le teinte de notes parme. Il ne s’agit pas là de poésie, mais des conclusions de l’algorithme de Myrissi. La start-up nancéienne a couplé intelligence artificielle, études comportementales et analyses d’imagerie médicale pour mettre au point un « traducteur sensoriel » qui intéresse au plus haut point les grands comptes de la parfumerie, mais aussi l’industrie agroalimentaires et la grande distribution. La start-up de cinq salariés compte déjà parmi ses références le parfumeur Estée Lauder, le producteur de cognac Camus et Intermarché. Dotée de contacts prometteurs, elle hésite aujourd’hui entre souscrire une levée de fonds classique d’un montant de 1,5 million d’euros ou céder aux avances de l’un ou l’autre de ses clients. L’été doit lui porter conseil.
Au cours des six derniers mois, Myrissi a participé au CES de Las Vegas à l’invitation du conseil régional du Grand Est, puis à Vivatech, à Paris en mai dernier.
Confrontés à l’innovation mondiale, nous avons constaté que nous n’avons pas de concurrence directe.
Muriel Jacquot, cofondatrice et directrice scientifique de Myrissi
L’ex-chercheuse de l’école d’ingénieurs agronomes Ensaïa voit ainsi récompensés 15 ans d’études sur la corrélation entre couleurs et odeurs.
En 2005, l’ appel à projets lancé par la Ville de Nancy pour commémorer le siècle des Lumières a marqué le coup d’envoi de sept ans de recherches fondamentales en partenariat avec le CHU. Une équipe de l’Ensaïa a fait sentir une odeur à des volontaires en leur demandant non pas de la reconnaître, mais d’y associer une couleur. D’autres tests IRM portant sur la représentation mentale des odeurs ont démontré que les aires cérébrales activées (cortex orbitofrontal et insulaire, système limbique) étaient aussi celles des couleurs.
Trouver un marché
Restait à valoriser cette recherche auprès de l’industrie cosmétique.
Nous avions démontré le lien entre couleur et odeur, mais il fallait intégrer une dimension émotionnelle pour intéresser l’univers du parfum. Nous avons repris nos recherches en nous appuyant sur la symbolique des couleurs, à la fois riche et assez stable à travers les cultures.
Muriel Jacquot
Cette fois, 600 personnes réagissent à des mots clefs comme « joie », « malice », ou « enthousiasme ». Myrissi parvient à un consensus de 60 % de bonnes prédictions – un score nettement plus fiable que la seule approche comportementale, faussée par les souvenirs personnels de chacun.
Breveté , ce traducteur sensoriel sert aujourd’hui à guider les nez dans la composition des parfums. Le marketing utilise la palette couleur-odeur-émotion pour concevoir des packagings adaptés. Tenue par des clauses de confidentialité, la PME ne divulgue pas le nom de tous ses clients. Elle évoque néanmoins les domaines du « home care », du « beauty care » ou celui des vins. Elle propose un développement à façon, suivi d’un abonnement. Une plate-forme permettra prochainement à des entreprises de plus petite taille de s’abonner au traducteur sensoriel pour composer, en solo, les associations les plus attractives.
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