Le ministère de l’Agriculture annonce la création d’une zone le long de la frontière belge, où tous les sangliers qui s’y trouveront seront éradiqués.
Six jours après la découverte, le 9 janvier, de deux sangliers contaminés par la peste porcine le long de la frontière française, le ministère de l’Agriculture a annoncé ce lundi le déploiement d’une « zone blanche » frontalière où tous les suidés (la famille des porcs et des sangliers) devront être abattus pour contrer le risque imminent d’introduction de la peste porcine sur le territoire français.
Loïc Gouello, inspecteur général de la santé publique vétérinaire, a été nommé à la tête d’une cellule de crise pour tenter de contrer une menace sanitaire redoutable pour les éleveurs de porcs français. Délimitée par une clôture, la zone blanche annoncée par le ministère sera quadrillée par les chasseurs, l’Office national des forêts et l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFC), qui devront y abattre toute la population de suidés et ramasser tous les cadavres.
Protection illusoire
A la frontière belgo-lorraine, la question n’est pourtant déjà plus de savoir si des sangliers malades entreront sur le territoire, mais quand ils arriveront – si tant est qu’ils n’y soient pas déjà. Les autorités belges et les fédérations de chasse de Meuse, de Meurthe-et-Moselle et des Ardennes ont déjà commencé la construction d’une double clôture électrique. Mais une dizaine de sangliers malades ont été retrouvés début janvier dans la « zone tampon » et les deux suidés découverts mercredi dernier avaient franchi les deux barrières.
Les fédérations de chasse ont pris en charge la construction et l’entretien quotidien de la clôture. On ne peut pas dire que les agriculteurs nous aient beaucoup aidés, car ils pensent être à l’abri dans leurs élevages confinés.
Christian Mahaut, président de l'Association meusienne des chasseurs de grand gibier
Le grillage électrique et même la construction d’un mur en dur ne constitueraient qu’une protection illusoire : les forêts frontalières s’étendent sur des milliers d’hectares et il est inconcevable de murer les routes et chemins frontaliers.
Sangliers terrés
Dès octobre, Stéphane Travers, alors ministre de l’Agriculture, avait déterminé une zone d’observation renforcée sur 113 communes dans laquelle les chasseurs procèdent déjà à de grandes battues. Ils réclament l’abrogation des quotas de chasse – tout en admettant que dans certains secteurs, il est impossible d’abattre ne serait-ce que la moitié du gibier autorisé, les sangliers affolés s’étant déplacés ou terrés dans des zones inaccessibles. Les faire débusquer par des chiens augmenterait le risque d’étendre la zone de contamination potentielle.
Nous sommes en présence de pompiers pyromanes : les chasseurs, qui ont favorisé la prolifération des sangliers par l’agrainage, revendiquent aujourd’hui un rôle sanitaire. Au lieu de contrôler les déplacements des sangliers, les autorités feraient mieux de contrôler leurs pratiques.
Marc Giraud, naturaliste et porte-parole de l'Association pour la protection des animaux sauvages
L’arrivée rapide d’une maladie jusqu’à présent constatée en Pologne, alors même qu’une contamination par les seuls sangliers se propagerait à la vitesse d’un kilomètre par mois, soulève des questions.
La peste porcine africaine, strictement animale, a pu être véhiculée par des humains. Elle pourrait également s’être développée à la faveur d’importations « sauvages » de suidés polonais pour rendre les chasses françaises plus giboyeuses. L’ONCFC n’exclut pas cette hypothèse : son trimestriel juridique et technique Faune sauvage estimait au premier trimestre 2018 qu’« avec l’arrivée de la peste porcine africaine, les introductions de gibier d’origine étrangère dans les enclos et parcs de chasse sont à surveiller de près ».
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