Distants d’une dizaine de kilomètres, la Volklinger Hütte et le Carreau Wendel de Petite-Rosselle témoignent de la mémoire encore vive d’une ère industrielle révolue et de l’aspiration à une nouvelle culture. Trente ans après leur fermeture, le destin des deux sites converge toujours, mais la dynamique transfrontalière reste en suspens.
Côté sarrois, un spectaculaire enchevêtrement d’acier d’où émergent six hauts-fourneaux dominant la ville. Côté lorrain, un complexe minier intact au cœur de 130 hectares de friche. Distants d’une dizaine de kilomètres, la Volklinger Hütte et le Carreau Wendel de Petite-Rosselle témoignent d’une époque révolue et font figure de monumentaux points d’ancrage d’une nouvelle culture.
Un siècle d’histoire commune
Erigés l’un et l’autre dans la deuxième moitié du XIXème siècle, le complexe sidérurgique et le carreau de mine ont tous deux drainé des milliers de travailleurs : jusqu’à 17 000 dans le complexe sidérurgique de Volklingen durant l’après-Guerre, et 5 000 mineurs dans les trois puits Wendel exploités dans les années 60.
Nulle part ailleurs la réalité industrielle n’est à ce point lisible, palpable et visitable. Les deux sites sont séparés par une ancienne frontière artificielle, mais ils ne trouvent leur sens que dans l’effet miroir. Ils témoignent du caractère indissociable de la sidérurgie et du charbon et racontent l’histoire des gens qui ont fait la Sarre, la Moselle-Est et la Grande Région.
Charles Stirnweiss, ancien maire de Forbach
1986 marqua à la fois l’extinction définitive des aciéries de Volklingen et l’arrêt du lavoir, du carreau et du chevalement du Carreau Wendel, prélude d’une fermeture échelonnée sur 15 ans. Depuis, le destin des deux sites n’a cessé de converger – tout en affichant un décalage de plus en plus marqué.
Classée par l’Unesco
Dès l’arrêt de l’activité la Dillinger-Hütter-Saarstahl AG a cédé l’aciérie au Land de Sarre, qui l’a promue au rang de monument culturel pour mieux assurer sa pérennité et sa reconversion. Inscrite en 1994 au Patrimoine mondial de l’Unesco, la Volklinger Hütte constitue aujourd’hui l’un des sites les plus attractifs d’Allemagne. Hauts-fourneaux, ateliers et halles des soufflantes se sont mués en salles de concerts et en galeries d’exposition qui ont accueilli 251 000 visiteurs en 2015.
Sauvé par l’an 2000
Ultime vestige minier de l’est mosellan, le carreau Wendel aurait sans doute fini en ruine sans l’obstination d’une poignée de militants de la sauvegarde du patrimoine industriel tant les coûts de restaurations, alors évalués à 15 millions d’euros, paraissaient faramineux dans un bassin houiller paupérisé. En choisissant, en 1999, d’organiser l’exposition Cultures du travail dans l’un de ses deux lavoirs, la Mission An 2000 a impulsé une opération de sauvetage cofinancée par l’Etat, les collectivités et les fonds européens. Le contrat Etat-Région 2000/2006 a entériné la création d’un musée de la mine ouvert en 2003. Cette reconstitution grandeur nature d’un chantier de creusement s’est complété en juin 2012 par le musée « les Mineurs Wendel », qui retrace sur 1 800 m2 la vie quotidienne et les politiques sociales de l’exploitation charbonnière durant un siècle. Lieu de mémoire et lieu de spectacle vivant, le Carreau Wendel a accueilli l’an dernier 70 000 visiteurs.
Métamorphose tertiaire
Phénix de l’ère minière, le carreau Wendel aspire à une nouvelle reconversion qui pourrait lui conférer une vocation tertiaire. Présenté en avril 2013 par l’Etablissement public foncier de Lorraine, le projet Métamorphose Wendel doit mobiliser 100 millions d’euros d’ici à 2033.
L’enjeu du projet consiste à dépasser la dimension touristique du site en y intégrant des lieux de vie, des équipements de formation et des bureaux. La maîtrise d’ouvrage que nous avons retenue saura faire vivre le site et révéler ses aspects grandioses dans la grisaille du quotidien.
Régis Stenger, responsable des études et projets de l’EPF Lorraine
L’atelier d’urbanisme clermontois Cap Paysage, déjà retenu pour aménager les bassins houillers du nord de la France, et le designer franco-suisse Ruedi Baur engageront en 2017 une première tranche de travaux d’un montant de 2,5 millions d’euros pour aménager l’esplanade du nouveau Carreau.
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