Initiateur de la stratégie Allemagne de la Lorraine, Mathieu Klein, président du conseil départemental de Meurthe-et-Moselle, s’apprête à présenter aux acteurs de la nouvelle grande région Est un dispositif élargi dont le trilinguisme français-allemand-anglais constitue le fer de lance.
Comment comptez-vous faire exister dans la nouvelle grande région Est la Stratégie Allemagne que vous avez initiée en Lorraine ?
J’ai demandé un rendez-vous à Philippe Richert, le nouveau président du conseil régional, pour lui présenter le travail réalisé dans le cadre de la stratégie Allemagne de la Lorraine et lui proposer de le porter à l’échelle de la nouvelle région en tenant compte de la forte expertise alsacienne. Il y a deux niveaux dans cette nouvelle étape : d’une part, la stratégie Allemagne en direction de nos trois Länder voisin de Sarre, de Rhénanie-Palatinat et du Bade-Wurtenberg ; d’autre part, la stratégie allemande, puisque nous sommes au cœur de deux régions européennes, Sarre-Lorraine-Luxembourg- Rhénanie-Palatinat-Wallonie côté lorrain, et la région métropolitaine du Rhin supérieur dans laquelle nos amis alsaciens sont engagés. Ce sont deux régions fortement germanophones où l’on parle allemand pour des raisons culturelles et économiques.
Quel rôle le bilinguisme occupera-t-il dans ces stratégies ?
Au-delà de la vie quotidienne, je voudrais proposer une stratégie qui vise à faire de l’Alsace-Lorraine-Champagne-Ardenne la première région trilingue de France. Je ne veux pas entrer dans le débat stérile qui opposerait l’allemand et l’anglais. Si les jeunes alsaciens, champ ’ardennais et Lorrains pouvaient dès le plus jeune âge apprendre à parler en même temps la langue maternelle, la langue du voisin et la langue du monde, ce serait une formidable opportunité d’élever leur niveau de qualification et de rentrer de plain-pied dans la compétition. J’y vois un moyen d’être à la hauteur de ce que nous sommes : la région porte d’entrée de la France sur l’Europe. Nous sommes la région des quatre frontières : transformons cet atout géographique en opportunité économique et culturelle et mettons le paquet !
Comment comptez-vous procéder ?
Toutes les études montrent que les Français ont un problème avec l’apprentissage des langues. En l’occurrence, il me semble qu’avoir une stratégie régionale est un atout. La ministre de l’Education nationale Najet Vallaud-Belkacem que j’ai rencontrée l’été dernier a pris acte de du fait linguistique régional. Les classes bi-langues qui assurent la continuité de l’enseignement de l’allemand sont maintenues et ce sont celles dont il faut viser le développement. J’ai travaillé en lien étroit avec Gilles Pécout, le recteur de l’académie Nancy-Metz qui est maintenant recteur régional de la nouvelle région. Avec cet ardent promoteur de l’apprentissage des langues étrangères et notamment de l’allemand, nous avons élaboré une convention avec l’Education nationale pour décliner ce dispositif sur l’ensemble de la nouvelle région, de Troyes à Colmar.
Cette convention vise entre autres à faciliter le recrutement de locuteurs allemands au premier degré pour conforter la continuité de l’enseignement en classe bi-langue. Je me bats maintenant pour que l’on étende ce dispositif à l’anglais. Il y a plus de ressources pour recruter des locuteurs anglophones que germanophones.
Sur qui comptez-vous vous appuyer ?
Je milite pour que cette stratégie soit portée par les acteurs territoriaux. Si elle tombe d’en haut, cela ne marchera jamais. Si le monde universitaire, les chambres consulaires, le tissu associatif et culturel portent cette ambition d’être la première région trilingue de France, nous y arriverons. Depuis l’annonce de la création de la nouvelle région, on se demande ce que les trois anciennes régions pourront bien faire ensemble. Le trilinguisme peut devenir une ambition collective. Je me propose d’être l’ambassadeur de cette mission-là. J’ai proposé au Sommet de la Grande Région de créer un cluster de la Grande Région sur le bilinguisme et cette motion a été retenue. Le trilinguisme constitue un projet fédérateur qui donne des objectifs communs à la société civile de la région. Il donnera des outils supplémentaires aux jeunes pour construire une vie professionnelle en France, en Allemagne, en Belgique ou au Luxembourg.
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