GRDF, Viessmann et Panasonic expérimentent un modèle intégré de pile à combustible. Installés dans un pavillon individuel, dans un petit collectif et dans une crèche municipale, les prototypes chauffent les bâtiments tout en réduisant leur facture d’électricité.
A Forbach (Moselle), trois chaudières d’un type particulier entament leur deuxième hiver de chauffe : installés en octobre 2014, instrumentés à raison de 15 capteurs chacun et surveillés de près par les experts nationaux de la transition énergétique, les modèles packagés Vitovalor 300-P fabriqués par Viessmann sont dotés d’une pile à combustible mise au point par Panasonic produisant simultanément chauffage et électricité. A la chaudière à condensation classique s’ajoute un cœur de pile qui transforme le gaz naturel en hydrogène, lequel, mélangé à l’air, engendre une cogénération d’énergie thermique et électrique.
Si innovantes soient-elles, les chaudières forbachoises fonctionnent depuis un an sans la moindre surprise. « La pose n’a requis aucune formation spécifique, l’installation s’est déroulée de manière de manière classique et il ne s’est produit aucune panne », témoigne Sébastien Dorkel, dirigeant de Dorkel Chauffage, qui emploie 56 salariés dans trois agences de l’est mosellan. Implantée à Forbach, où se situe un pôle d’expertise Alphéa spécialisé dans l’hydrogène, et partenaire du fabricant de chaudières Viessmann, lui-même située à une trentaine de kilomètres de la sous-préfecture mosellane, Dorkel Chauffage s’est impliqué spontanément dans une expérimentation qui lui paraît prometteuse.
Il reste sans doute des améliorations à apporter pour permettre à la pile de fonctionner de manière autonome, sans chaudière d’appoint. Mais il s’agit avec certitude d’un produit d’avenir.
Sébastien Dorkel
Ni la production électrique de la pile, ni la part de chaleur générée par l’hydrogène, ne seront connus avant 2016, mais la mairie de Forbach estime d’ores et déjà avoir réalisé des économies de chauffage et d’électricité dans ses trois bâtiments tous neufs ou rénovés. Lors de sa commercialisation, la chaudière à pile à combustible sera vendue à un tarif compris entre 10 000 et 15 000 euros, le prix étant susceptible de baisser à la faveur d’une fabrication à grande échelle. Le système est déjà largement diffusé au Japon et s’est déployé l’an dernier en Allemagne, où le prix du kW électrique, qui dépasse 30 cents, s’avère particulièrement incitatif. En France, l’obstacle législatif assimilant tout site utilisant de l’hydrogène à une installation classée a été levé en juin dernier. La pile à combustible n’a plus qu’à démontrer sa performance pour s’imposer parmi les technologies d’avenir.
Un consortium de fabricants et de chercheurs
L’expérimentation de Forbach s’inscrit dans le cadre du projet Epilog soutenu par l’Ademe pour définir de nouvelles solutions au gaz naturel. Un consortium réunit GrDF, le fabricant de chaudières Viessmann, le Grigen (laboratoire de la direction recherche et technologie de GDF Suez) et le Comité scientifique et technique des industries climatiques (Costic). Chaque chaudière est reliée à 15 capteurs qui en mesureront les performances en continu durant deux ans.
A peine plus encombrant qu’un réfrigérateur, le produit packagé Vitovalor 300-P mis au point par Viessmann se compose d’un ballon de stockage d’énergie de 170 litres, d’un ballon d’eau chaude sanitaire de 46 litres et d’un chauffage d’appoint.
Le cœur de pile PEL (Proton exchange membrane) conçu par Panasonic reçoit en amont un mélange d’hydrogène et d’oxygène dont l’électrolyse entre une cathode et une anode produit une réaction physico-chimique. L’énergie produite se convertit en électricité tandis que la chaleur fatale est récupérée et valorisée sous forme de chauffage ou d’eau chaude sanitaire stockée dans le ballon.
Combinant rendement électrique et production de chaleur, le système présente un rendement global de 90 % et génère une économie de 40 % par rapport à une consommation énergétique globale.
La pile à combustible présente une production de chaleur faible de 1 à 1,5 kw thermique, le brûleur à condensation arrivant en complément.
L’objectif de la pile à combustible n’est pas de produire des hautes températures, mais de produire simultanément et en continu chaleur et électricité.
A Forbach, la chaudière équipée d’une pile à combustible a été couplée à des radiateurs à chaleur douce limités à 35 °. Dans les logements collectifs, elle alimente un plancher chauffant à une température maximale de 28°.
Le système, qui travaille de manière continue, ne pourrait pas fonctionner à haute température et ne serait pas adapté à des petits radiateurs.
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