Urbaniste-paysagiste de réputation internationale, le strasbourgeois Alfred Peter organisera dans les premiers jours de 2016 une université d’hiver sur la nouvelle Grande Région Acal, un territoire qu’il connaît bien pour avoir travaillé entre autres au devenir de l’espace entre Strasbourg et Kehl et du Val de Rosselle dans l’Est mosellan. Destinée aux professionnels, l’initiative s’intéressera surtout aux interactions avec les voisines européennes.
Quel est le principe de vos « universités » ?
Elles réunissent pendant une semaine des praticiens du développement territorial : ingénieurs de collectivités, chargés de développement dans les Sem, bureaux d’études, architectes, urbanistes, paysagistes… autour d’un thème concret – mais ces réflexions n’ont pas pour enjeu de répondre à une commande publique. Elles rassemblent des compétences diverses pour apporter des réponses dans un contexte de raréfaction de l’argent public et décloisonnent des sujets trop souvent enfermés dans des cases. Elles cherchent ainsi à établir le lien manquant entre ville et mobilité. D’où le nom de notre structure porteuse : Spaces in Motion. En janvier dernier, la première « Winterschool » a planché sur l’interaction entre la grande échelle et la bordure de trottoir, à savoir les impacts respectifs du projet de grand contournement ouest de Strasbourg, de l’autoroute A 35 qui parcourt l’Alsace, des axes de pénétrante urbaine et du centre-ville. Ce thème sera d’ailleurs repris au cours d’une université d’été prévue fin août.
Quel est l’objectif de vos travaux sur la nouvelle grande région Alca – ou Acal ?
Nous voulons contribuer à fabriquer du contenu pour cette grande région. Pour l’instant, sur la question des échelles spatiales d’aménagements, il faut constater que l’on est devant un vide conceptuel majeur. Et devant une absence de coordination entre des projets nombreux et coûteux. Pourquoi la question de la gare TGV lorraine à Vandières n’a-t-elle posée qu’aux Lorrains ? Le doublement de l’A 31 ne concerne-t-il qu’eux ? Que va permettre l’édification d’une grande région ? Le sillon mosellan forme un axe stratégique au niveau de l’Europe, il convient de le repositionner à cette échelle.
Pourquoi la dimension transfrontalière vous semble-t-elle fondamentale ?
Le point que je soulevais à l’instant sur la coordination des projets se pose de façon redoublée si on franchit les frontières. Nous ignorons sans doute l’existence de projets d’infrastructure qui se chiffrent en milliards d’euros. Comment la Moselle-Est pourrait-il raisonner sans Sarrebruck ? La même question se pose à Thionville, à Strasbourg, à Saint-Louis près de Bâle. La question de la non-coordination trouve une illustration éclatante entre l’Alsace et le Pays de Bade : voilà la seule région au monde où se concentrent sept voies ferroviaires parallèles. Il y aurait donc de quoi constituer un réseau régional d’une densité exceptionnelle. Mais les interconnexions entre France et Allemagne sont quasi inexistantes. Mulhouse, Colmar, Sélestat, Strasbourg, Haguenau, Lauterbourg : nous n’avons que l’embarras du choix des endroits où les créer ou les renforcer.
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