Dessinateur de presse et illustrateur, André Faber s’engage dans la littérature. Après « Les Hauts-Fourneaux ne repoussent pas », parus en mars 2014, les éditions François Bourin publient « Tous les grands-pères sont poilus ».
Deux livres en six mois, un troisième en préparation… S’agit-il d’une vocation tardive ou d’une envie d’écrire longtemps inassouvie ?
Ecrire est pour moi une vieille envie, et même une vieille frustration. J’ai toujours considéré le dessin comme un mode d’expression assez primaire. J’ai écrit bien avant d’être publié – des nouvelles, des poèmes, des lettres, des mails, ou lors d’ateliers d’écriture. J’ai peut-être commencé l’écriture avec la BD « Monsieur l’Homme », en 1989, qui est quasi de l’anti-dessin – une sorte d’alphabet géométrique très proche de l’écriture. Si tu enlèves les traits, que reste-t-il ? Du texte.
Pour passer à la publication, il a fallu un long temps de maturation. Ecrire demande un temps plein, je ne pouvais pas le faire avant. Mon premier livre, « Les hauts-fourneaux de repoussent pas », était prêt depuis 15 ou 20 ans. Je l’ai écrit en deux mois. C’est la première vanne qu’il a fallu ouvrir – une vanne industrielle, en l’occurrence.
Les Hauts-fourneaux évoquent votre enfance à Maizières-les-Metz au temps de la sidérurgie, « tous les grands-pères… », votre propre grand-père. Vos écrits sont-ils définitivement ancrés dans l’histoire régionale et familiale ?
Je ne veux pas être estampillé auteur régional. Quand je parle de mon grand-père ou des hauts fourneaux, j’espère rejoindre une globalité. Ca se passe ici, mais ça va au-delà. De même que je m’intéresse à des récits de marins, j’espère bien que mes écrits puissent aller au-delà de Metz-Nord ou de Thionville. Cela étant, on ne parle bien que de ce l’on connait. Je ne suis pas un grand voyageur. J’aime bien ma région, le gris, la pluie. C’est un décor qui me convient. La guerre, l’industrie, la désindustrialisation, forment une histoire assez riche pour alimenter des récits.
A l’occasion de la sortie des Hauts-fourneaux, vous êtes allés à la rencontre du public ouvrier. Avez-vous un message à faire passer ou une cause à défendre ?
Je me garde bien de donner des leçons, mais j’ai un témoignage à apporter. « Cause » est un mot élimé. Je ne veux pas être caricatural dans mes jugements, présenter les fait tout blanc ou tout noir, revendiquer une appartenance de classe… Je préfère l’idée de créer une connivence, un lien d’humanité. Certains auteurs ou dessinateurs savent créer cette appartenance de cœur et d’âme. J’aime beaucoup Sempé, et j’ai l’impression que les gens qui aiment Sempé se reconnaissent dans un train.
Votre expérience de journaliste et de dessinateur a-t-elle enrichi votre manière d’écrire ?
On ne m’a jamais demandé d’écrire, mais il m’est arrivé de le faire, notamment lors de reportages dessinés pour l’hebdomadaire luxembourgeois Le Jeudi. Je me suis servi de cette formation pour l’écriture fictionnelle. Mais ne me suis pas cassé les doigts sur un clavier à longueur d’années en tant que rédacteur. Je suis resté vierge de l’écriture personnelle ou poétique qui est presque bannie dans la presse. Le dessin m’a aidé à apporter des formes et des couleurs à mes récits écrits, à construire des images. Quand j’écris, mes personnages, je les vois.
Abdré Faber présentera le livre « Les grands-pères sont tous poilus » à la librairie Géronimo à Metz le 15 novembre à 17 h.
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