Engagée dans une démarche qualité depuis 1996, Nancy (102 500 hab., Meurthe-et-Moselle) élabore une méthode lente et empirique, mais ambitieuse et susceptible de remodeler à terme l’ensemble du fonctionnement de la municipalité.
Une coïncidence se trouve à l’origine de la démarche qualité de Nancy : la ville abrite l’Ecole des mines dont l’un des professeurs, Pascale Carayon, enseigne également à l’université de Madison (Wisconsin). Cette ville, sans doute la première du monde à s’être engagée dans la démarche qualité en 1983, a été élue ville n°1 des Etats-Unis pour la qualité de vie et pousse le souci de la satisfaction des usagers jusqu’à faire remplir aux suspects arrêtés par la police un questionnaire sur les conditions de leur arrestation ! L’équipe dirigeante de la ville de Nancy constitue dès 1996 un groupe de travail sur la qualité. Au cours du premier trimestre 1997, deux élèves ingénieurs de l’Ecole des mines effectuent leur stage en conduite de projets informatique et entretien des bâtiments dans les services municipaux.
En route vers les labels
Après le départ des stagiaires, la démarche s’essouffle quelque peu. Mais l’idée de qualité reste dans l’air. Ainsi, les employés des ateliers édictent leurs propres consignes de rangement, de propreté, de débarras, d’ordre et de rigueur. Les animatrices de centres aérés organisent une consultation des parents et s’adaptent aux requêtes formulées. La mairie recrute, en mars dernier, Paul Mougel, ingénieur management à EDF, détaché durant trois ans en tant que conseiller en gestion et qualité.
Mon objectif consiste à faire certifier au moins un ou deux services. Mais qu’il s’agisse d’ISO 9002, qui privilégie l’assurance des techniques, ou de la qualité “totale” plus axée sur le facteur humain, le label n’est pas une fin en soi. L’essentiel est que la démarche se poursuive même lorsque je serai parti : la qualité, ce n’est jamais fini.
Paul Mougel
En juin, l’équipe de direction signe une charte s’engageant à satisfaire les usagers et à mieux agir vis-à-vis des partenaires (préfecture, conseil général, communauté urbaine). Les services des permis de construire et de la sécurité font l’objet des premières études de certification.
Il s’agit de procédures assez simples, et les agents se montrent motivés. L’étape suivante consiste à fédérer plusieurs services. Celui des achats, par exemple, est très transversal. Dans ce cas, il faut expliquer la démarche à tous les agents concernés. Chaque proposition peut prendre des heures de discussion : chacun doit comprendre l’organisation des autres services, puis accepter de changer son propre fonctionnement. Mais il faut savoir perdre un an sur le calendrier prévu afin de sensibiliser, puis de motiver réellement l’ensemble des agents.
Paul Mougel
L’ingénieur a élaboré certaines pistes d’action pour motiver le personnel : organiser une fête de la qualité ou, encore, élaborer un système d’intéressement collectif – en termes de crédits ou de conditions de travail – pour les services les plus impliqués.
La démarche touche très vite aux questions sensibles, comme la notation ou les relations avec les élus. C’est pourquoi elle se heurte rapidement à des résistances. Nombre d’agents se montrent défaitistes, d’autant qu’ils gardent en mémoire de nombreuses tentatives d’amélioration qui n’ont pas abouti.
Paul Mougel
Un tableau de bord qualité
L’exemple de la voirie illustre les retombées possibles d’un perfectionnement en apparence minime. Constatant que 42 % des quelque 600 appels hebdomadaires au service proviennent d’usagers se plaignant de la saleté des trottoirs, les agents ont mis au point un système de saisie informatique des réclamations applicable à tous les services en relation avec le public.
Sur la base de ce “tableau de bord”, les agents disposeront d’instruments de mesure vis-à-vis des élus. Ces données permettront également de rédiger des plans d’action prioritaires et de nouveaux plans de management.
Paul Mougel
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