Espace transnational réunissant l’Alsace du Nord et les agglomérations allemandes de Landau et de Karlsruhe, l’Eurodistrict Pamina se mue en groupement européen de coopération transfrontalière. La nouvelle structure se fixe comme priorité de remédier aux déséquilibres entre bassins d’emploi.
Entre l’Alsace du Nord et ses voisines allemandes du Sud Palatinat et Mittlerer Oberrhein, l’espace de coopération grandit et change de statut. L’Eurodistrict a gagné 66 communes et 70 000 habitants sur son versant alsacien à la faveur du redécoupage des dernières élections départementales et voit sa population passer à 1,7 million d’habitants dont 350 000 côté français. L’actuel groupement local de coopération transfrontalière (GLCT) se transformera à la fin du semestre en groupement européen de coopération territoriale (GECT). La structure demeurera de droit français et conservera son siège dans l’ancienne douane de Lauterbourg (Bas-Rhin).
Les fonds européens se diluent dans le Rhin
Outre ces mutations institutionnelles, Pamina a des défis concrets à relever. Celui de se faire sa place dans le paysage de la coopération transfrontalière, avec les moyens financiers appropriés. Comptant parmi les plus anciennes structures transfrontalières de France, ce territoire bénéficiait jusqu’en 2008 de crédits spécifiques d’Interreg qui s’étaient montés à 14 millions d’euros lors du dernier programme mené dans ce cadre, l’Interreg-III. Depuis, la gestion des fonds européens a été mutualisée dans le Rhin supérieur, obligeant Pamina à développer de nouveaux moyens.
80 000 postes à pourvoir
Pour la population alsacienne de Pamina, l’enjeu majeur est celui de l’emploi. La partie allemande connaît un quasi plein emploi avec 4 % de chômage dans l’ensemble du Mittlerer- Oberrhein et 2 % dans le territoire de Bühl-Rastatt.
Le versant allemand exprime un besoin de main d’œuvre de 80 000 personnes d’ici à 2030, dont 5 000 ingénieurs !
Patrice Harster, directeur de l’Eurodistrict
Les demandeurs d’emploi alsaciens se trouvent ainsi à quelques encablures d’une offre riche que captent déjà 16 000 frontaliers dans l’espace Pamina. Mais les choses ne sont pas si simples. Il y a les hiatus connus.
L’employeur allemand ignore à peu près tout du diplôme français. Les modules de formation ne se recoupent pas, nous l’avons constaté pour des postes de soudeurs par exemple. Beaucoup de jeunes ont perdu la maîtrise de la langue allemande et se montrent peu mobiles.
Patrice Harster
Les Français, immigrés comme les autres
Il y a le plus surprenant : le sentiment de se faire dépasser par des Italiens, des Espagnols, des Grecs a priori pas plus compétents ni familiers de la langue de Goethe, mais que les collectivités allemandes cherchent à attirer. Au point qu’un « Welcome center » doit ouvrir d’ici à la fin de l’année à Karslruhe pour apporter toute l’information et les services pour leur installation avec femmes et enfants. On a même vu le Land de Bade-Wurtemberg chercher des Chinoises pour occuper des postes d’aides dans les maisons de retraite.
Cette politique a une explication : la dénatalité dans le Pays de Bade, décrypte Patrice Harster.
La région cherche par conséquent des actifs qui s’installeront durablement sur son territoire.
Patrice Harster
Face à cette concurrence nouvelle, la simple information ne suffit plus, estime l’Eurodistrict : il faut prendre son bâton de pèlerin pour dénicher une à une les entreprises dont les projets de recrutement échappent aux circuits traditionnels de placement par le service public de l’emploi. Avec la Chambre de commerce et d’industrie de Landau, l’Eurodistrict a ainsi emmené 120 jeunes collégiens et lycées de la région de Wissembourg à la découverte d’entreprises recruteuses. L’initiative a permis à une bonne dizaine d’entre eux de décrocher un contrat d’apprentissage.
--Télécharger l'article en PDF --